4 février 2010
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17:08
3) LA TZIGANE
Même époque de composition que la "Nuit Rhénane" et même atmosphère pour cette évocation fugitive des amours, condamnées d'avance, avec Annie Playden. La strophe 2 suggère le heurt de l'amour avec la réalité. L'expression elliptique des sentiments est très remarquable dans son <<symbolisme>>.
La tzigane savait d'avance
Nos deux vies barrées par les nuits
Nous lui dîmes adieu et puis
De ce puits sortit l' Espérance
L'amour lourd comme un ours privé
Dansa debout quand nous voulûmes
Et l'oiseau bleu perdit ses plumes
Et les mendiants leurs Ave
On sait très bien que l'on se damne
Mais l'espoir d'aimer en chemin
Nous fait penser main dans la main
A ce qu'a prédit la tzigane
Nos deux vies barrées par les nuits
Nous lui dîmes adieu et puis
De ce puits sortit l' Espérance
L'amour lourd comme un ours privé
Dansa debout quand nous voulûmes
Et l'oiseau bleu perdit ses plumes
Et les mendiants leurs Ave
On sait très bien que l'on se damne
Mais l'espoir d'aimer en chemin
Nous fait penser main dans la main
A ce qu'a prédit la tzigane
4/ ANNIE
Depuis 1904, Apollinaire n'avait plus rien su d' Annie expatriée en Amérique. Dès 1906, il avait publié un curieux poème, plein d'inventions hardies et de cocasserie triste : "L'Émigrant de Landor Road" où il se voyait partant rejoindre la jeune fille. Pour l'impossible rencontre d' Annie dans une Amérique imaginaire, son instinct l'a peu trompé. Quarante ans plus tard la fugitive d'autrefois vivait encore, non au Texas mais en Califomie.
Le poète qui a toujours refusé l'étiquette de simple <<fantaisiste>> l'est pourtant ici. L'émotion et le regret sont voilés de <<blague>> : les deux amants, ombres muettes, restent liés l'un à l'autre, mais ce n'est plus que par un baroque détail vestimentaire...
Depuis 1904, Apollinaire n'avait plus rien su d' Annie expatriée en Amérique. Dès 1906, il avait publié un curieux poème, plein d'inventions hardies et de cocasserie triste : "L'Émigrant de Landor Road" où il se voyait partant rejoindre la jeune fille. Pour l'impossible rencontre d' Annie dans une Amérique imaginaire, son instinct l'a peu trompé. Quarante ans plus tard la fugitive d'autrefois vivait encore, non au Texas mais en Califomie.
Le poète qui a toujours refusé l'étiquette de simple <<fantaisiste>> l'est pourtant ici. L'émotion et le regret sont voilés de <<blague>> : les deux amants, ombres muettes, restent liés l'un à l'autre, mais ce n'est plus que par un baroque détail vestimentaire...
Sur la côte du Texas
Entre Mobile et Galveston il y a
Un grand jardin tout plein de roses
Il contient aussi une villa
Qui est une grande rose
Une femme se promène souvent
Dans le jardin toute seule
Et quand je passe sur la route bordée de tilleuls
Nous nous regardons
Comme cette femme est mennonite 1
Ses rosiers et ses vêtements n'ont pas de boutons
Il en manque deux à mon veston
La dame et moi suivons presque le même rite
Entre Mobile et Galveston il y a
Un grand jardin tout plein de roses
Il contient aussi une villa
Qui est une grande rose
Une femme se promène souvent
Dans le jardin toute seule
Et quand je passe sur la route bordée de tilleuls
Nous nous regardons
Comme cette femme est mennonite 1
Ses rosiers et ses vêtements n'ont pas de boutons
Il en manque deux à mon veston
La dame et moi suivons presque le même rite
1 - Secte puritaine dont la sévérité proscrit tout ornement
5) ZONE
C'est le poème d'ouverture du recueil, mais il parle du centre de Paris, ce qui en fait une ouverture paradoxale. (titre : zone, alors qu'il est question de la tour Eiffel,…). On peut donc penser qu'il reprend l'étymologie grecque "ceinture" : il fait à pied le tour de la ville, mais aussi le tour de ses problèmes (interrogations sur lui - même, son enfance, sa religion : réflexion sur les souffrances, sur l'amour).
Poème faisant partie du cycle de Marie (en référence à Marie Laurencin, peintre, rencontrée par Guillaume Apollinaire en 1907). C’est en changeant le titre du recueil "Eau de Vie" en "Alcools" et en décidant de supprimer toute ponctuation que l’auteur rajoute en tête de l’ouvrage le poème "Zone", dernier écrit de l’ensemble : il donne ainsi à son recueil une orientation philosophique.
On est frappé par l'apparence du poème : certains vers sont détachés, d'autres regroupés en strophes ; il n'y a pas réellement de régularité. Ce sont des vers libres (pas de mètres réguliers), les lois de la versification ne sont pas respectées. Ces vers riment à peine : ils sont assonancés. Pas de ponctuation. Le poème n'est pas complètement déroutant, mais apparaît quelquefois bizarre.
5) ZONE
C'est le poème d'ouverture du recueil, mais il parle du centre de Paris, ce qui en fait une ouverture paradoxale. (titre : zone, alors qu'il est question de la tour Eiffel,…). On peut donc penser qu'il reprend l'étymologie grecque "ceinture" : il fait à pied le tour de la ville, mais aussi le tour de ses problèmes (interrogations sur lui - même, son enfance, sa religion : réflexion sur les souffrances, sur l'amour).
Poème faisant partie du cycle de Marie (en référence à Marie Laurencin, peintre, rencontrée par Guillaume Apollinaire en 1907). C’est en changeant le titre du recueil "Eau de Vie" en "Alcools" et en décidant de supprimer toute ponctuation que l’auteur rajoute en tête de l’ouvrage le poème "Zone", dernier écrit de l’ensemble : il donne ainsi à son recueil une orientation philosophique.
On est frappé par l'apparence du poème : certains vers sont détachés, d'autres regroupés en strophes ; il n'y a pas réellement de régularité. Ce sont des vers libres (pas de mètres réguliers), les lois de la versification ne sont pas respectées. Ces vers riment à peine : ils sont assonancés. Pas de ponctuation. Le poème n'est pas complètement déroutant, mais apparaît quelquefois bizarre.
A la fin tu es las de ce monde ancien
Bergère ô tour Eiffel le troupeau des ponts bêle ce matin
Tu en as assez de vivre dans l'antiquité grecque et romaine
Ici même les automobiles ont l'air d'être anciennes
La religion seule est restée toute neuve la religion
Est restée simple comme les hangars de Port-Aviation
Seul en Europe tu n'es pas antique ô Christianisme
L'Européen le plus moderne c'est vous Pape Pie X
Et toi que les fenêtres observent la honte te retient
D'entrer dans une église et de t'y confesser ce matin
Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent tout haut
Voilà la poésie ce matin et pour la prose il y a les journaux
Il y a les livraisons à 25 centimes pleines d'aventure policières
Portraits des grands hommes et mille titres divers
J'ai vu ce matin une jolie rue dont j'ai oublié le nom
Neuve et propre du soleil elle était le clairon
Les directeurs les ouvriers et les belles sténo-dactylographes
Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent
Le matin par trois fois la sirène y gémit
Une cloche rageuse y aboie vers midi
Les inscriptions des enseignes et des murailles
Les plaques les avis à la façon des perroquets criaillent
J'aime la grâce de cette rue industrielle
Située à Paris entre la rue Aumont-Thieville et l'avenue des Ternes
[...]
Bergère ô tour Eiffel le troupeau des ponts bêle ce matin
Tu en as assez de vivre dans l'antiquité grecque et romaine
Ici même les automobiles ont l'air d'être anciennes
La religion seule est restée toute neuve la religion
Est restée simple comme les hangars de Port-Aviation
Seul en Europe tu n'es pas antique ô Christianisme
L'Européen le plus moderne c'est vous Pape Pie X
Et toi que les fenêtres observent la honte te retient
D'entrer dans une église et de t'y confesser ce matin
Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent tout haut
Voilà la poésie ce matin et pour la prose il y a les journaux
Il y a les livraisons à 25 centimes pleines d'aventure policières
Portraits des grands hommes et mille titres divers
J'ai vu ce matin une jolie rue dont j'ai oublié le nom
Neuve et propre du soleil elle était le clairon
Les directeurs les ouvriers et les belles sténo-dactylographes
Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent
Le matin par trois fois la sirène y gémit
Une cloche rageuse y aboie vers midi
Les inscriptions des enseignes et des murailles
Les plaques les avis à la façon des perroquets criaillent
J'aime la grâce de cette rue industrielle
Située à Paris entre la rue Aumont-Thieville et l'avenue des Ternes
[...]