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6 février 2010 6 06 /02 /février /2010 12:32


 
http://ecx.images-amazon.com/images/I/41SN7BWGBPL._SL500_AA240_.jpgI) LES BUDDENBROOK

Grandeur et décadence d'une famille bourgeoise allemande au XIX ème siècle.

La fin d'une époque

Thomas Mann raconte, en onze parties, le destin des   Buddenbrook, une famille de la haute bourgeoisie de Lubeck. De 1835 à 1877, nous assistons au déclin de cette famille, à travers I'histoire de quatre générations : le patriarche Johann Buddenbrook, heureux commerçant et fournisseur de la famille royale, qui s'éteint en 1842, âgé de soixante-dix ans ; son fils, Jean Buddenbrook, qui poursuit une brillante carrière et qui devient consul des Pays-Bas. Il meurt en 1855,à l' âge de soixante ans, laissant pour unique héritier son fils Thomas, la figure centrale du roman. Thomas, grâce à son sérieux et à I'honnêteté de son caractère, obtient de hautes fonctions, dont la charge de sénateur. II meurt prématurément à cinquante ans et laisse un seul fils : Hanno, un enfant fragile, doué de dons artistiques exceptionnels. Hanno devient ainsi le dernier descendant de la famille,  mais une épidémie de typhus emporte le jeune garçon en 1877 et met ainsi un terme à la lignée des Buddenbrook.

Valeurs bourgeoises et aspirations artistiques

 Le roman "Les Buddenbrook" porte un sous-titre éloquent : <<Décadence d'une famille >>. Thomas Mann décrit en effet le processus qui mène une famille bourgeoise, symbole d'une certaine réussite sociale, à sa déchéance et à sa disparition pure et simple. Alors que le patriarche Johann Buddenbrook incarne les valeurs bourgeoises, froides et réalistes, le dernier descendant de la famille, le frêle Hanno, représente l' artiste, aux dons de musicien extraordinaires, mais qui, inadapté au monde qui I'entoure, ne peut survivre. Thomas Mann brosse avec finesse, et parfois ironie, le tableau d'une époque en décomposition et d'une bourgeoisie agonisante. La race des  Buddenbrook s' éteint faute d'avoir pu s'adapter aux règles d'un monde nouveau, mais surtout parce que la culture - au sens le plus large - que leur cIasse a créée, corrode peu à peu leur force d' âme et leur volonté d'agir.

Extraits :

On trouve déjà dans ce premier roman les grands thèmes de l'oeuvre de l'écrivain allemand ; les relations étroites entre la culture et la décadence et entre le génie et la maladie .. on voit également apparaître l' esquisse, en la personne de Hanno, de la figure centrale de l'oeuvre future de Mann :    l' artiste.

La famille s'est réunie autour du patriarche, Johann Buddenbrook

On s'était réuni dans << le salon des paysages >>, au premier étage de l'antique et spacieux hôtel que la maison Johann Buddenbrook venait d'acquérir dans la Mengstrasse et que la famille occupait depuis peu. Les tapisseries solides et souples, séparées des murs par un espace vide, représentaient de vastes paysages aux couleurs tendres, comme le mince tapis qui revêtait le sol, des idylles dans le goût du XVIII ème  siècle : joyeux vignerons, laboureurs diligents, bergères joliment enrubannées qui, penchées sur le miroir de l'oncle, tenaient sur leurs genoux des agneaux bien peignés ou échangeaient des baisers avec de galants bergers... Des soleils couchants où dominaient les ors baignaient la plupart de ces paysages, s'harmonisant ainsi avec l' étoffe des meubles laqués de blanc et les rideaux de soie des fenêtres.

                                 ***

Portrait d'un honnête homme

Grâce à ses voyages, à ses connaissances, à l'intérêt qu'il prenait à tout, Thomas Buddenbrook était dans son milieu la tête la moins bourgeoisement bornée, et il était sûrement le premier à sentir l'étroitesse et la  mesquinerie des conditions dans lesquelles il se mouvait. Dehors, dans sa grande patrie, après l' essor de la vie publique, amené par les années de la révolution, une période de détente, de stagnation et de revire ment avait suivi, trop vide pour occuper une intelligence vive. Le consul avait assez d'esprit pour n'attacher qu'une importance purement symbolique à toute activité humaine et pour mettre toute sa volonté, ses facul  tés, son enthousiasme et son besoin d'agir au service de la petite république dans le rayon de laquelle son nom était un des premiers .. il voulait servir aussi ce nom, cette maison de commerce dont il avait hérité... il avait assez d' esprit pour sourire de cette ambition de parvenir dans un domaine aussi restreint à la grandeur et à la puissance, et pour poursuivre néanmoins cette ambition.

                                ***

Problèmes de succession, après la mort de Thomas Buddenbrook

Dans l'état présent des choses, il fallait liquider ;  la firme n'avait qu'à disparaître, et cela dans un délai d'un an. Telles étaient les dernières volontés du sénateur. Mme Permaneder s' en montrait violemment émue.
" Et Johann, le petit Johann, et Hanno ? " demandait-elle.Le fait que son frère eût ignoré son fils et unique héritier, qu'il n' eût pas voulu lui conserver la maison de commerce, la décevait et la peinait beaucoup. Elle versa des pleurs à l'idée qu' il faudrait renoncer à cette firme vénérable, à ce joyau transmis de génération en génération, dont on allait clore l'histoire alors qu'il existait un héritier naturel.

Traduction de Geneviève Bianquis, Fayard, 1965


Notes :

<<Ce n'est donc pas seulement aux dimensions de son oeuvre que Thomas Mann doit d'être devenu un des premiers écrivains de notre temps. Dès le début, ses écrits s'imposent par leur exceptionnelle valeur artistique. Celle ci restera constante dans la suite, malgré un renouvellement incessant des formes. Mais la chose  exprimée prévaudra de plus en plus sur le souci de l'expression. A partir du moment où le jeune auteur des "Buddenbrook" découvre et assume sa vocation, sans jamais quitter le plan de l'art, il le transcendera toujours. >>

-Louis Leibrich, Thomas Mann, Classiques du XXe siècle, Editions Universitaires, 1957

<<L' oeuvre de Thomas Mann se situe pour moi dans la catégorie très rare du classique moderne, c' est-à-dire de l' oeuvre, non point du tout indiscutée, mais au contraire sans cesse reprise, rejugée, examinée sur toutes ses faces et à tous ses niveaux, et servant à la fois de pierre de touche et d'aliment. De telles oeuvres nous  touchent, à la cinquième lecture, pour des raisons différentes de celles qui nous les firent aimer à la première, ou même opposées à celles-ci. L' atmosphère de dépaysement et presque d'exotisme que respire un lecteur français qui aborde pour la première fois "Les Buddenbrook", dissipée du fait de I'habitude, (...) laisse à nu le document humain, le drame de l'homme aux prises avec les forces familiales ou sociales qui l' ont construit et qui peu à peu vont le détruire.>>

-Marguerite Yourcenar, <<Humanisme de Thomas Mann >), Cahiers de I'Herne, I'Herne, 1973


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II) LA MORT A VENISE

Un écrivain taciturne ne peut se soustraire
à l'emprise magique de Venise et à l'amour qui le subjugue.

D' abord impérialiste, en opposition avec son frère, le romancier républicain Heinrich Mann (1871-1950),Thomas  Mann évolua par la suite. Réfugié en Suisse puis aux États-Unis après l' avènement du national- socialisme, il prit position contre l' hitlérisme.

La décadence et la volupté

En attendant le tramway, Gustav Aschenbach a le regard porté vers un homme en costume de voyage. Il a dépassé la cinquantaine, s'est voué à la littérature qu'il considère comme une activité grave au service de la perfection formelle et des valeurs morales. Il est soudain pris d'un désir d'évasion. Il aboutit, attiré par un secret instinct, à Venise -le symbole de la conjuration de la beauté, de la volupté et de la mort. L'écrivain pense y prendre quelques semaines de repos, mais il n'en partira plus parce qu'il s'éprend d'un bel adolescent polonais, Tadzio. Il est vite envoûté par l'empire absolu qu'exerce sur lui la beauté juvénile accomplie. Cette inclination accidentelle, portée par le mystère vénitien et une épidémie de choléra, s'amplifie jusqu'à prendre les dimensions d'une vision terrifiante de luxure et de barbarie. Enfermé dans son idée fixe, Aschenbach ne voit pas la ville se dépeupler. Jamais il n'osera adresser la parole à l'éphèbe qui n'a qu'un regard étonné pour l'homme fatigué et taciturne. La mort emporte l'écrivain qui salue l'enfant adoré d'un dernier  sourire.

Une "fascination de la mort"

"Aimer la mort, disait Mann, c'est aimer la vie et réciproquement." Dans cette "fascination de la mort", l'homme prend la mesure du tragique de son existence. Dans le cas où l'esprit est ruse de la maladie pour hâter la venue de la mort, le rôle d'accélérateur est souvent tenu par la perversité sexuelle. Pour se sauver de cette faille, la réflexion morale se manifeste dans l'art, car le projet artistique est toujours menacé par ce qui menace la conscience morale. La vie artistique est un danger ; elle réclame pour sa réussite une ascèse qui soutienne l'attente créatrice ; Aschenbach l' oublie pour succomber à la fascination de la beauté qui surpasse toutes les réussites artistiques, pour suivre cet appel que la maladie fait entendre comme sa voix la plus simple : celui de la mort.
 

 

Extraits :

Une soudaine envie de voyager

Soit qu'à l'apparition de l' étranger des visions de voyage eussent frappé son imagination, ou bien que quelque influence physique ou morale fût en jeu, à sa surprise il éprouva au dedans de lui comme un étrange  élargissement, une sorte d'inquiétude vagabonde, le juvénile désir d'un coeur altéré de lointain, un sentiment si vif, si nouveau, dès si longtemps oublié ou désappris que, les mains dans le dos et les yeux baissés, il s'arrêta, rivé au sol pour examiner la nature et l' objet de son émotion. C' était envie de voyager, rien de plus ; mais à vrai dire une envie passionnée, le prenant en coup de foudre, et s' exaltant jusqu' à l'hallucination. Son désir se faisait visionnaire, son imagination, qui n' avait point encore reposé depuis le travail du matin, inventait une illustration à chacune des mille merveilles, des mille horreurs de la terre, que d' un coup elle tâchait de se représenter.

                           ***
La rencontre discrète de Tadzio

Cet homme grave et pensif se mit à rechercher, à essayer de deviner quel nom pouvait bien sonner à peu près comme "Adgio" et ce problème lui semblait digne d' occuper sa pensée. En effet, à l'aide de quelques réminiscences polonaises, il arriva à conclure qu' il devait s' agir de "Tadzio", abréviation de "Tadeus", prolongé en exclamation "Tadziou". Tadzio se baignait. Aschenbach, qui l' avait perdu de vue, découvrit bien loin dans la mer sa tête et son bras qu'il levait pour ramer ; la mer, en effet, devait être plate à une grande distance. Cependant on semblait déjà s' inquiéter à son sujet ; déjà des voix de femmes l'appelaient des cabines, criant de nouveau ce nom qui avait l'air de dominer la plage comme un mot d'ordre et, avec ses consonnes douces, son ou final  prolongé avec insistance, avait quelque chose de tendre et de sauvage à lafoi : "Tadziou !Tadziou !"

                           ***

Aschenbach salue une dernière fois l'enfant adoré

Il semblait à Aschenbach que le psychagogue (
Magicien, magicienne qui faisait profession d'évoquer les ombres. pâle et digne d' amour lui souriait là-bas, lui montrait le large ; que, détachant la main de sa hanche, il tendait le doigt vers le lointain, et prenant les devants s'élançait comme une ombre dans le vide énorme et plein de promesses. Comme tant de fois déjà il voulut se lever pour le suivre.

Quelques minutes s' écoulèrent avant que l'on accourût au secours du poète dont le corps s'était affaissé sur le bord de la chaise. On le monta dans sa chambre. Et le même jour la nouvelle de sa mort se répandit par le monde où elle fut accueillie avec une religieuse émotion.

Traduit de l'allemand par Félix Bertaux et Charles Sigewalt, éditions Livre de Poche

La Mort à Venise 
(1912) a été portée à l'écran par Luchino Visconti avec Dirk Bogarde, Bjorn Andresen, Mark Burus et SiIvana Mangano en 1971. Gustav Malher est le lien entre les deux oeuvres puisque Mann a appris la mort du compositeur pendant son séjour à Venise, qu'il a appelé son héros Gustav, et que Visconti a soutenu son adaptation avec la musique de Malher.

Notes

<< A ses débuts, il aime à se donner pour "le chroniqueur et l'interprète de la décadence, l'amateur de la vérité
pathologique et de la mort, l'esthète attiré par l'abîme." (...) S'il peint avec prédilection des phénomènes de  décadence individuelle ou sociale, il s'y attache d'une curiosité passionnée, en psychologue et en médecin, avec un double espoir de découvrir les maladies qui rongent la vie, mais ensuite les moyens de la préserver et de la régénérer.>>

 -Geneviève Bianquis,

<< La lecture de Schopenhauer, faite à vingt ans dans sa chambre d' étudiant à Munich, a été pour Thomas Mann la même révélation éblouissante qu'elle fut pour Nietzsche au même âge. Il  a de ce jour admis le pessimisme foncier qui voit la vie cruelle et le monde mauvais, qui renonce d'emblée à introduire dans le réel de la justice ou de la clarté, et qui s'enivre des mélodies de la mort et de la fascination du néant. Dans cette doctrine de  renoncement à la vie et à l'action, il a discerné ce que Nietzsche jeune y aimait aussi : "l'atmosphère de rigueur morale, un relent faustien, un goût de mort, de croix,de tombeau".>>


http://ecx.images-amazon.com/images/I/41Cn5Rp8FQL._SL500_AA240_.jpgIII) LA MONTAGNE MAGIQUE


Le jeune Hans Castorp, venu  pour trois semaines visiter son cousin au sanatorium Berghof, y restera finalement sept ans.

Le docteur Behrens est le grand-prêtre du sanctuaire Berghof : il initie les malades aux dogmes ; iI est l' intercesseur entre les fidèles et les puissances véritables, invisibles - en l' occurrence, les actionnaires de la société Berghof.
Hans est à Hambourg ingénieur en construction navale, artisan anonyme de l' aveuglement quotidien, mais iI gagne peu à peu en lucidité, sur ses maîtres et sur  lui-même.

Le temps de la maladie

Quittant la haute société de Hambourg, Hans arrive à Davos-Platz, une petite ville de repos dans les Alpes.
Son cousin Joachim Ziemssen y reçoit les soins du grand docteur Behrens, chef du sanatorium Berghof. Celui-ci, à l'affût de la moindre déficience physique, convainc Hans, affaibli par le changement de climat, de prolonger son séjour. Un autodidacte italien, Settembrini, devient son éducateur spirituel. Hans apprécie en outre le rythme calme de la vie à Davos, où les heures de repos sur la terrasse alternent avec les copieux repas au réfectoire. Il s'éprend d'une femme russe, Clawdia Chauchat, qu'i! ose aborder juste avant qu'elle ne parte. Joachim est devenu soldat, refusant de retarder sa vocation davantage ; mais son mal empire, et il retourne au Berghof où il meurt. Hans se partage alors entre Settembrini et son adversaire intellectuel Naphta. Clawdia revient avec un amant fortuné, l'imposant Peeperkorn, qui se suicidera. Naphta fait de même au cours d'un duel contre Settembrini. En 1914, Hans quitte le Berghof pour s'enrôler.

Un monde à part

La "montagne magique"
du Berghof exerce véritablement sur ses hôtes une attraction surnaturelle, à  laquelle échapper est difficile. Ainsi Joachim est puni de mort pour s'être enfui vers le "monde d'en bas"; et l'oncle de Hans, venu le libérer de la montagne, part précipitamment lorsqu'il sent qu'eIle pourrait le garder prisonnier à son tour. Le sortilège consiste en ce que Davos décharge ses proies de leur rôle dans la société active. Leur retrait géographique se traduit par un désengagement de leur conscience, affranchie de toute responsabilité envers ce monde industrieux dont la vie les a séparés. Le Berghof affirme son autarcie par sa temporalité propre : ici, la plus petite unité de temps est le mois, les saisons n'existent pas, on vit dans un éternel présent. Cette disponibilité  d'esprit permet aux hommes responsables, tel Hans, de concentrer leur réflexion sur l'essentiel : le mystère de leur présence au monde.

Extraits :

Joachim évoque un concert

- (...) c'est tout simplement de la musique d'orphéon, mais c' est quand même un changement qui vous réjouit. Il remplit quelques heures d' une manière fort convenable ; il les répartit et les remplit, une à une, de telle sorte qu'on en garde du moins quelque chose, tandis que d' ordinaire ici on gaspille si affreusement les jours et les semaines. Voyez-vous, un numéro de concert sans prétention dure peut-être sept  minutes, n'est-ce pas ? et ces minutes, elles forment quelque chose pour elles, elles ont un commencement et une fin, elles se détachent et sont en quelque sorte garanties par le laisser-aller général. De plus, elles-mêmes sont encore divisées, d' abord par les coupes du morceau, et ensuite en mesures, de sorte qu'il arrive toujours quelque chose et que chaque instant prend un certain sens auquel on peut se tenir, tandis qu' autrement... Je ne sais pas si je me suis bien....
 - Bravo, s' écria Settembrini, bravo ! lieutenant, vous définissez à merveille un aspect incontestablement moral de la musique, à savoir qu' elle prête à l' écoulement du temps, en le mesurant d'une manière particulièrement vivante, une réalité, un sens et une valeur.

                             ***


Hans décIare son amour à Clawdia

- (...) le corps, lui aussi, et l' amour du corps, sont une affaire indécente et fâcheuse, et le corps rougit et pâlit à sa surface par frayeur et honte de lui-même. Mais aussi il est une grande gloire adorable, image miraculeuse de la vie organique, sainte merveille de la forme et de la beauté, et l' amour pour lui, pour le  corps humain, c' est de même un intérêt extrêmement humanitaire et une puissance plus éducative que toute la pédagogie du monde !... Oh, enchantante beauté organique qui ne se compose ni de peinture à l' huile ni de pierre, mais de matière vivante et corruptible, pleine du secret fébrile de la vie et de la pourriture ! Regarde la symétrie merveilleuse de l' édifice humain, les épaules et les hanches et les côtes arrangées par paires, et le nombril au milieu dans la mollesse du ventre, et le sexe obscur entre les cuisses ! Regarde les omoplates se remuer sous la peau soyeuse du dos, et l' échine qui descend  vers la luxuriance double et fraîche des fesses, et les grandes branches des vases et des nerfs qui passent du tronc aux rameaux par les aisselles, et comme la structure des bras correspond à celle des jambes. Oh, les douces régions de la jointure intérieure du coude et du jarret, avec leur abondance de délicatesses organiques sous leurs coussins de chair ! Quelle fête immense de les caresser, ces endroits délicieux du corps humain ! Fête à mourir sans plainte après ! Oui, mon Dieu, laisse-moi sentir l'odeur de la peau de ta rotule, sous laquelle l'ingénieuse capsule articulaire sécrète son huile glissante !

Traduit de l' allemand par Maurice Betz. Collection Horizon libre, 1961


Notes :

<<Cette "société" européenne (Ia station de Davos hébergeant des ressortissants de tous les pays) représente en somme, à deux mille mètres au-dessus des frontières, une sorte de communauté hors du temps, à la fois primitive et future. (...) Il s'agit là surtout d'un individu.. Castorp, type d' Allemand moyen ; celui-ci, à peine retenu par la montagne et disposant désormais de loisirs ilIimités, passe bientôt de la vie fébrile et superficielle de notre époque aux préoccupations du  XVIII ème siècIe, commençant ainsi, à l'instar de Wilhelm Meister*, à se préoccuper de sa culture et de sa formation. (...) II semble, en  définitive, que la vie, mesurée et lucide jusqu'au malaise, de ce dernier, nous est proposée en exemple par l'auteur lui-même>>

*
Les Années d’apprentissage de Wilhelm Meister est un roman d'apprentissage écrit par  Goethe  en  1795/1796  : un héros chemine et doit faire son apprentissage de la vie tout en déjouant les différents obstacles qui se dressent devant lui.

- Laffont et Bompiani, Dictionnaire des oeuuvres, 1955

<<A notre époque où I'homme, scindé de son milieu ambiant par des acquisitions trop rapides et devenues dangereuses (...), paraît moins que jamais capable de redescendre en soi ou de s'élever à une vue désintéressée du monde.. le roman de Mann compte parmi les rares productions contemporaines qui persistent à nous voir "sous l'aspect de la vie et sous I'aspect de la mort, sous l'aspect du siècIe et sous l'aspect de l'éternité". >>

- Marguerite Yourcenar, Hommage de la France à Thomas Mann, 1955




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Divers personnages....


DANTE


                                                                                                      Béatrice Portinari









Dante par Giotto








Première page de la Divine Comédie













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SOPHOCLE



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                                                                                                       Antigone




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Philotecte abandonné par les Grecs







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Sophocle  Bas relief en marbre









Sophocle




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Pythagore



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Le Banquet manuscrit sur papyrus.






Platon par Raphaël





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ARISTOTE





Aristote par Raphaël




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Aristote sur une fresque murale à Rome




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Alexandre à une bataille






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Alexandre combattant un lion







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Bronze - Alexandre









Buste d'Alexandre le Grand







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Alexandre et Aristote





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Enluminure "Chanson de Roland"










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Mort de Roland à Ronceveaux
















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Charlemagne et le Pape Adrien I






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Charlemagne et son fils Louis le Pieux






RUTEBOEUF

                            



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Ruteboeuf par Clément Marot

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