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18 août 2009 2 18 /08 /août /2009 14:49



1265 - 1321


Séparé à tout jamais de ses deux passions, Florence, sa ville natale, et Béatrice Portinari, Dante
s'absorba dans "La Divine Comédie", un long poème mystique et une somme de toutes les connaissances médiévales.

                         

  DANTE  ALIGHIERI



Rencontre avec Béatrice :


Pour les biographes, Dante eut une enfance sans histoire ; pour les poètes, la première partie de sa vie fut dominée par un évènement mémorable, le seul de sa jeunesse qu'il évoqua dans ses oeuvres. Il avait neuf ans, et il rencontra Béatrice, une petit fille vêtue de rouge, âgée de neuf ans elle aussi, et qui "ne paraissait pas fille d'homme mortel mais de dieu".  Cette rencontre avec elle qu'il nomma "la glorieuse dame de sa pensée" donna naissance à un amour qui accompagnera l'enfant puis le jeune homme jusqu'à ses vingt-cinq ans, âge auquel il composa "Vita Nuova".

Avant cela, il avait passé son enfance dans une famille de la vieille noblesse florentine (il était né en 1265), de conditions modestes, les Alighieri. Ceci explique que ses études furent limitées à la grammaire, c'est à dire à l'apprentissage du latin médiéval. Sans soutien ni fortune, il dut prendre sur lui de pousser plus loin ses études, travaillant notamment avec Bruno Latini, poète et maître rhétorique.

L'amour et les amours :

Vers l'âge de dix-huit ans, toujours étudiant, Dante rencontra pour la deuxième fois Béatrice. Cette fois, la jeune fille lui adressa la parole et, "comme ce fut la première fois que ses paroles s'envolèrent vers mon oreille, j'en reçus tant de douceur que comme enivré, je quittai la foule et me réfugiant solitaire chez moi dans une chambre, je me mis à penser à cette dame très courtoise" Dante écrivait alors, en langue vulgaire (langue populaire),  des poèmes lyriques qui le firent connaître des cercles littéraires.

Ses oeuvres étaient fortement marquées de son amour pour Béatrice, qui toucha au sublime lorsque celle-ci mourut (1290), en pleine beauté et en pleine jeunesse. Profondément marqué par cette disparition, le poète tenta d'oublier en s'absorbant dans le travail, dans les méditations et dans la création littéraire. Il écrivit notamment Vita Nuova (Vie nouvelle, 1292  1293), histoire de sa vie intime et de son amour pour Béatrice Portinari, la femme tant aimée et tant regrettée.  C'est à cette époque que Dante découvrit véritablement la philosophie, et qu'il prit part aux querelles qui opposaient alors les partisans de Saint Augustin
à ceux de Saint Thomas d'Aquin et d'Aristote.

Cependant, cette vie studieuse ne le tint pas à l'écart des mondanités ; trahissant le souvenir de Béatrice, infidèle à la femme que sa famille lui avait choisie, Dante ne résista pas aux séductions et au libertinage que le monde florentin lui offrait. Homme de plaisirs, il se consolait des amours perdues par d'autres amours, comme le montre d'ailleurs la fin de "Vita Nuova", où une "gentille dame" l'observe de sa fenêtre et le console de sa douleur.


Une période troublée :

Tout en poursuivant son perfectionnement littéraire, Dante s'intéressa alors à la vie publique. Il faut savoir que l'époque était pa
rticulièrement troublée : les partisans du pape (guelfes) s'opposaient à ceux de l'empereur (gibelins), les villes italiennes étaient en conflit entre elles, les factions rivales d'une même ville se disputaient le pouvoir et étaient elles-mêmes souvent déchirés par des dissensions internes. Ainsi, dans  le partie des guelfes auquel appartenait la famille Alighieri, Dante soutenait les Blancs contre les Noirs dans le but de défendre l'indépendance de Florence contre les visées de la Papauté. Cette période fut également marquée par des changements spirituels et culturels, alors que, dans les arts, Giotto, libéré de la tradition byzantine, réformait la peinture, et que les poètes découvraient de nouvelles formes d'expression.

L'homme public :

Vers la fin des années 1290, pour les Blancs, Dante
fut envoyé en ambassade par Florence afin de défendre la ligue guelfe de San Geminiano. Puis en 1300, il fut nommé prieur,  la charge la plus élevée de la commune. Mais en 1302,  Charles de Valois entra à Florence au nom du Pape et Dante fut condamné à un exil de deux ans par ses adversaires et à une forte amande. N'étant pas présent lors de la condamnation, il fut  condamné à être brûlé vif, ce qui signifiait l'exil perpétuel de sa terre natale. Il séjourna en divers lieux, s'arrêtant là où  un seigneur lui offrait l'hospitalité. Cet exil, ajouté à l'injustice de la peine, provoqua  en lui une grave crise de conscience et une remise en question spirituelle, qui allaient donner naissance à "La Divine Comédie". Il  tenta d'aider ses compagnons bannis à rentrer à Florence, mais sans succès, les Blancs subissant de lourdes pertes à cette occasion.
Il participa à deux batailles au moins, à Castel Publicciano en 1303 et à Lastra en 1304, puis il se retrouva seul, tenta par tous les moyens de regagner les faveurs de Florence. Malgré cette vie d'errance, il ne cessa d'écrire, commençant en 1304 "l'Enfer", la première partie de ce qui allait être "La Divine Comédie". Cette oeuvre fut donc entièrement créée en exil, entre 1304 et 1321. Dante finit par trouver refuge à Vérone, puis à Ravenne : il écrivit jusqu'à sa mort, qui survint en 1321, à la suite d'une malaria.


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L'OEUVRE /  LA DIVINE COMEDIE :


La Divine Comédie est composée de cent chants, trente-quatre pour l'Enfer, trente- trois pour le Purgatoire, et trente-trois pour le Paradis.

Le poète représente l'Enfer comme un immense entonnoir divisé en neuf cercles, lesquels sont subdivisés en plusieurs cavités, où les supplices des damnés sont variés comme leurs crimes et augmentent d'intensité à proportion que le diamètre du cercle se rétrécit ; descendus au dernier cercle, Dante et Virgile rencontrent Satan qui est enfoncé là, au cœur même de la terre, comme la base de l'édifice infernal ; ils se laissent glisser le long de ses reins pour sortir de l'abîme, et quand ils ont passé le centre de gravité, au lieu de continuer à descendre, ils montent vers un autre hémisphère et voient bientôt paraître d'autres cieux. Ils arrivent au pied d'une montagne qu'ils commencent à gravir ; puis ils parviennent à l'entrée du Purgatoire , divisé en degrés ascendants comme l'Enfer en degrés descendants ; chaque degré est le lieu de purification d'un péché mortel, et comme il y a sept péchés mortels, il y a dans le Purgatoire sept cercles qui leur correspondent : au-delà du septième, sur le sommet de la montagne, est le Paradis terrestre. Virgile y abandonne son compagnon, et le laisse s'élever au ciel sous la garde de Béatrix qui est le symbole de la théologie. Béatrix parcourt avec Dante les cieux des sept planètes, et après avoir dans chaque ciel répondu à ses ques
tions et éclairci ses doutes, elle le conduit devant le divin Triangle, et la vision du poète est terminée.-

Quelques extraits : 

MANFREID

Je me tournai et le regardai fixement:
Il était blond et beau et de noble apparence,
Mais un de ses sourcils d'un coup était fendu.
Après que j' eus nié, en toute humilité,
de ne l'avoir jamais vu, "Regarde", me dit-il,
en montrant une plaie au haut de sa poitrine. [...]
[Il reprit]   Après que mon corps fut transpercé
par deux pointes mortelles, en pleurs je me rendis
a Celui qui octroie volontiers son pardon.
Horribles ont été les péchés de ma vie,
mais l'infinie bonté a de si larges bras
quelle accueille tout ce qui se tourne vers elle.

Et si l'évêque de Cosence, mis en chasse
contre moi, en ce temps, par le pape Clément,
avait bien discerné cette face de Dieu,
les restes de mon corps se trouveraient toujours
à la tête du pont, proche de Bénévent,
encore défendus par un tertre de pierres.
Mais la pluie les détrempe et. le vent les secoue
hors du royaume, près des bords du fleuve Verde,
où illes transporta, toute lumière éteinte.))

Purgatoire, 111, 106-111; 118-132.
Trad. P. RENUCCI



ADIEU DE VIRGILE A DANTE

"Tu as vu, fils, le feu à terme et l'éternel ;
et te voilà  rendu en un lieu où moi-même
je n'ai plus faculté de rien apercevoir.
Je t'ai mené ici par l'esprit et par l'art;
prends désormais pour guide ton seul gré :
tu es hors des chemins abrupts, des voies étroites.
Voila le soleil qui brille en face, devant toi,
vois l'herbette et les fleurs, et vois les arbrisseaux
que la terre en ce lieu d'elle-même fait naître.

Tu peux demeurer là ou marcher au travers,
le temps qu'arrivent, pleins de bonheur, les beaux yeux
qui naguère en pleurant m'ont envoyé vers toi.
N'attends plus ni un mot ni un signe de moi :
libre, droit et sans tache est ton propre vouloir,
il y aurait faute à ne pas suivre sa sagesse.
Je te couronne et t'investis.par-dessus tob

Purgatoire, XXVII, 127-142.
Trad. P. RENUCCI

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Parmi les artistes contemporains de Dante, citons le peintre Giotto (1266-1337), le sculpteur et architecte Pisano (1290-1349), les écrivains Boccace (1313-1375) et Pétrarque (1304-1374).

Le masque mortuaire de Dante se trouve au Palazzio Vecchio de Florence. De nombreux peintres ont représenté le poète : Giotto (fresque de la  chapelle du Podestat à Florence), Raphaël (fresque du Triomphe de l'Eucharistie au Vatican).

***************


NOTES :


Outre la Divine Comédie et  les oeuvres citées plus haut, Dante a laissé des traités : la "Monarchie universelle"  (1310-1312) a pour sujet le pouvoir temporel et spirituel, et préconise l'établissement d'une monarchie universelle de droit divin pour assurer la paix du monde ; le "De Vulgari eloquentia" (vers 1304, inachevé) est une défense, en latin, de la langue vulgaire comme langue littéraire ; "Le Banquet" (1304-1307) est un traité philosophique et moral.

<<En définitive, c'est au nom de la traditionnelle morale chrétienne et d'un immuable désir d'ordre et d'harmonie que Dante a réprouvé l'expansion économique de Florence, qu'il a déploré la montée de la bourgeoisie... C'est en vertu des mêmes valeurs qu'il a condamné la confusion des pouvoirs. Son système politique se révèle étroitement dépendant d'un idéal chrétien : pour Dante, à aucun instant on ne doit oublier que la vie d'ici-bas n'a aucune  valeur en soi, si ce n'est celle de déterminer la vie que l'on aura dans l'au-delà. >>
M. Bonan-Garrigues, Dante, Éditions universitaires, 1970

Dante fut un des chefs de file du dolce stil nuovo (
nouveau style doux  en français ; courant littéraire italien majeur qui a pris naissance au XIII ème et s'est poursuivi jusqu'au XVème) notamment dans Vita nuova  oeuvre en vers et en prose ; cette nouvelle forme d'expression était fondée sur une conception platonique de l'amour, visant à spiritualiser l'amour courtois.

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18 août 2009 2 18 /08 /août /2009 14:36


Situation du roman au XII ème siècle

On sait que le XII ème  siècle marque le premier grand essor de la littérature française. Dès le début du siècle, l'identité linguistique de la France commence à s'illustrer plus indépendamment de la culture latine, et surtout ecclésiastique, des siècles précédents. Hétérogène,  voire régionale, par ses dialectes, dont le picard, le normand, le francien,  le champenois. etc., dans le Nord et l'occitan dans le Sud, la littérature vernaculaire se répartit d'emblée en plusieurs catégories homogènes tant par leur matière que par leur forme. Le récit hagiographique, la chanson de geste, et la poésie lyrique des troubadours témoignent tous et bien avant 1150  d'une volonté pleinement consciente d'adapter l'expression littéraire à des fins non moins esthétiques que religieuses, politiques, ou sentimentales. Mais si l'on veut bien comprendre la naissance d'une harmonie déjà classique entre langue littéraire, technique poétique, et conscience sociale, il faut tenir compte du surgissement, vers 1130, d'un genre qui jouira d'une vogue extraordinaire pendant presque deux siècles, celui du roman.

Primitivement,  le mot roman désigne la traduction du latin en langue vulgaire,  mais ce sens général fait place à la notion d'une oeuvre narrative en octosyllabes à rimes plates,  telle fragment du Roman d' Alexandre (1130) d'Albert de Pisançon. Viennent ensuite une série de trois oeuvres d'inspiration gréco-latine (1150-1165) : le Roman de Thèbes, Enéas (tous les deux anonymes), et le Roman de Troie de Benoît de Sainte-More.
Dans ces romans d'antiquité,  les sujets épiques empruntés aux Anciens s'enrichissent d'un exotisme voulu, et aux exploits guerriers typiques d'un Enéas ou d'un Hector s'ajoute une nouvelle préoccupation, celle du
couple amoureux - Enéas et Lavine, Jason et Médée - aux prises avec la passion naissante.

De la même époque proviennent les romans d'inspiration celtique, répandue en France par les jongleurs bretons et gallois,  la matière de Bretagne fournit à Béroul et à Thomas la vaste histoire de Tristan, amant
de la reine Iseut,  et à Marie de France les sujets de ses lais, qui sont de courtes nouvelles sentimentales, parfois légèrement teintées d'enchantement  magique et féerique. Avec l'appui d'une longue tradition érudite, le Roman de Brut (1155) de Wace,  traduit de "l'Historia regum Britanniae (1137), pseudo-chronique de Geoffroi de Monmouth, met le monde arthurien à la portée du public courtois pour la première fois. C'est cette même légende du roi Arthur et de ses chevaliers de la Table Ronde qui deviendra le sujet par excellence des romans courtois et qui fera le renom du plus grand romancier du XII ème  siècle,  Chretien de Troyes.




Un écrivain courtois

Chrétien de Troyes, né à Troyes vers 1135 et mort vers 1183, fut un trouvère et poète français, considéré comme un des premiers auteurs de romans de chevalerie.

Comme son nom l'indique, Chretien était probablement originaire de Troyes,  où il aurait fréquenté la cour champenoise de Marie, fille du roi de France Louis VII et d'Aliénor d'Aquitaine. Vers 1159,  Marie épouse le comte Henri Ier de Champagne et devient par la suite l'animatrice d'un centre littéraire et intellectuel des plus brillants. C'est en effet à Marie, "Ma dame de Champagne", que Chretien attribue la matière et le sens d'un de ses romans, "Le Chevalier à la charrette". Plus tard, sous le mécénat de Philippe d' Alsace. comte de Flandre (mort en 1191),  il entreprend son dernier roman, " Le Conte du Graal",  qu'il n'achève pas avant sa mort. D'où les dates limites de 1159 et 1191 entre lesquelles se situe la majeure partie de son oeuvre.

Contemporain et des romanciers courtois émules de l' Antiquité et de ceux qui puisent dans les sources celtiques, Chretien se trouve au carrefour des deux traditions. D'après les titres qu'il énumère dans le prologue de Cligès,  son oeuvre de jeunesse comporte des imitations d'Ovide,  dont deux contes adaptés des Métamorphoses, et des traductions de "l'Ars amandi" et des "Remedia amoris", aussi bien qu'un conte du Roi Marc et d' Iseut la Blonde. emprunté à la matière de Bretagne. A part un "Philomela" inspiré des "Métamorphoses",  aucun de ces écrits ne nous est parvenu. En revanche,  on lui attribue le conte non-arthurien de "Guillaume d'
Angleterre", apparenté à la légende de saint-Eustache, et deux chansons d'amour dans le genre des trouvères lyriques. Quoique marginal, ce bilan révèle chez Chretien une connaissance assez étendue des courants littéraires de son époque.

Perceval ou le conte du Graal

Perceval, jeune homme naif, vit avec sa mère au fond des bois. A cause de la mort de son mari et des deux  ainés de Perceval, elle veut à tout prix lui épargner leur sort. Mais Perceval rencontre par hasard des  chevaliers de la Table Ronde et trouve sa vocation. Malgré les protestations de sa mère, il gagne la cour d'Arthur et se fait chevalier par une série d'épreuves prodigieuses.  Pendant ses errances, il passe une nuit au chateau d'un roi infirme et assiste à un cortège mystérieux. Par peur de sembler encore naif, il n'interroge pas son hôte sur la lance qui saigne et le "Graal" - une sorte de vase - qu'il voit défiler devant lui. Le lendemain il se trouve seul au château. Au départ, il apprend que sa mère est morte de chagrin lorsqu'il l'a quittée. Chez Arthur, une laide demoiselle lui  reproche son silence au chateau du Graal. Par conséquent, le roi restera infirme, son royaume sera dévasté, et ses sujets subiront les pires malheurs. Avant d'expier ses fautes, Perceval passe cinq années en quête du Graal. Un vendredi Saint, un ermite - son oncle
maternel - lui explique que le péché envers sa mère lui "trancha la langue"  au château du Graal.  En fait, le roi infirme est le cousin de Perceval, et le père de celui-là   -lui aussi oncle maternel de Perceval - se nourrit d'une seule hostie portée dans le Graal. Maintenant pénitent, Perceval écoute la lecon de piété et de charité et communie le jour de Pâques. S 'ensuivent les aventures de Gauvain, mais le roman, inachevé, ne reprendra pas celles de Perceval.

Extrait :

Un valet d'une chambre vint
Qui une blanche lance tint,
Empoignée par le milieu,
Et défila devant le feu
Près de ceux qui là s'asseyaient.
Toute l'assistance voyait
La lance au fer étincelant
D'une goutte de sang coulant
Du fer de la lance au sommet,
Et jusqu'à la main du valet
Coulait cette goutte vermeille.
Perceval vit cette merveille,
Lui qui au château reposa.
Mais de ce mystère il n'osa
Demander d'où il provenait :
Un conseil il se rappelait
De l'homme qui armer le fit
Qui lui enseigna et apprit
De se garder de trop parler.
Il craint, s'il ose en discuter
Qu'on ne lui tienne à vilenie :
Donc il ne le demanda mie.
Alors deux autres valets vinrent
Qui chandeliers en leurs mains tinrent
De fin or ouvragé en nielle.
La contenance était très belle
De ceux qui  chandeliers portaient.
Sur chaque chandelier brillaient
Dix chandelles à tout le moins.


Un graal entre ses deux mains
Une demoiselle tenait
Qui avec les valets venait,
Belle et douce et bien habillée.
Dans la salle elle fit son entrée,
Et du graal qu'elle tenait
Si vive clarté émanait
Que le chandelier fut obscur
Comme perd l'astre sa lueur
Quand se lève soleil ou lune.
Après elle s'ensuivait une
Qui tenait un plateau d'argent.
Le graal, qui allait devant
De fin or épuré était ;
Pierres précieuses avait
Ce graal, de toutes manières,
Des plus riches et des plus chères
Qu'il y aient en mer ou sur terre.
Valaient plus que toute autre pierre
Celles du graal, sans doutance.
Tout ainsi que passa la lance
Devant le feu elles passèrent
Et d'une chambre à l'autre allèrent.
Le jeune homme les vit passer,
Mais il n'osa point demander
A qui du graal on servait,
Car toujours au coeur il avait
Le conseil du prudhomme sage...

Trad. D. MADDOX


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18 août 2009 2 18 /08 /août /2009 11:02


43 av J.C. - 17 av  J.C.





L'ART D'AIMER :


Quels sont les lieux priviligiés de rencontres ? Comment plaire ? Comment garder sa conquête ? Telles sont les principales questions auxquelles Ovide répond.

Ovide
composa trois poèmes didactiques : "L'Art d'aimer", son antidote, "Les Remèdes à l'amour " et un poème sur l'art du maquillage "Fards", dont il ne subsiste plus que quelques fragments.


Né le 20 mars 43 av. J.C. 
Décédé vers 17 av. J.C.




Le manuel du parfait don juan et de la parfaite séductrice :


"L'Art d'aimer" est un poème didactique en trois livres sur les moyens de plaire. La traduction traditionnelle du titre n'est pas excellente, car ce n'est pas tant l'art d'aimer que l'art de séduire
qu' Ovide a voulut enseigner.

Au livre I, le poète traite du problème des lieux de rencontre et des façons de plaire. Ainsi  indique-t-il au lecteur que c'est dans les lieux publics, les dîners en ville et au spectacle qu'il a le plus de chances de faire des rencontres intéressantes. Le professeur de galanterie donne ensuite toutes sortes de prescriptions sur l'usage des billets doux, des complicités utiles, sur la façon de s'habiller, les propos à tenir (compliments et promesses).

Le livre II énumère les moyens qui permettront aux hommes de s'attacher leurs conquêtes. Ovide recommande les cadeaux ainsi que des moyens plus psychologiques comme être en admiration perpétuelle, donner des preuves de dévouement, louer même les défauts de la femme aimée, s'arranger pour que les infidélités demeurent ignorées, mais, dans certains cas, éveiller la jalousie.

Le livre III, à la différence des deux premiers, s'adresse aux femmes, qui séduiront les hommes par les parures du corps et de l'esprit.

Un ouvrage scandaleux :


"L'Art d'aimer", où Ovide place les deux sexes sur un pied d'égalité avec le même droit au plaisir, à la culture et à la liberté, fit du bruit en son temps et demeure aujourd'hui un livre plein de charme et d'humour. Il existe une différence de forme importante entre les poèmes didactiques d'Ovide et les oeuvres sérieuses du même genre littéraire : alors que ces dernieres étaient écrites dans le mètre  (
le vers grec est formé par la répétition de brèves séquences syllabiques, chaque séquence représentant un mètre ou un pied.) de la grande poésie (l'épopée), l'héxamètre dactylique* , Ovide a opté, pour souligner le caractère parodique de ses traités, de les écrire en distiques élégiaques **. Ce rythme était destiné à l'expression du sentiment amoureux : la poésie érotique à Rome est essentiellement élégiaque.

*
  L'hexamètre dactylique, est un un vers qui a six "mesures" (ou six pieds, qui sont entre deux barres obliques dans les exemples suivants), c'est à dire, un groupe de syllabes constituant la mesure élémentaire du vers. Les "mesures" (ou pieds) de l'hexamètre sont constitués d'une alternance de syllabes brèves et de syllabes longues (on ne considère que les voyelles).

** Le distique élégiaque est un ensemble de deux vers (un distique) composé pour le premier d'un hexamètre dactylique et pour le second d'un pentamètre dactylique. C'est par excellence le vers de l'élégie grecque et latine de l'Antiquité.

Dans "L'art d'aimer", le didactisme s'efface au plan formel, tout en s'affirmant au niveau discursif ; ce décalage de la forme et du fond était un véritable coup de maître.


Extraits :

Complicité de la servante :

Mais d'abord lie connaissance avec la servante de la femme que tu veux séduire : tu dois t'y employer. C' est elle qui te facilitera les premiers pas. Assure-toi de la part qu' elle a dans la confidence de sa maÎtresse et de sa .complicité assurée et discrète pour tes amours. Afin de la gagner, emploie les promesses, emploie les prières  ; ce que tu lui demandes, il lui sera facile de te le procurer, si elle le veut. Elle choisira le moment favorable (les médecins aussi tiennent compte du moment) où l' âme de sa maîtresse est bien disposée et se prête à la séduction.
                                      
                     

La pâleur du teint  :



Un teint blanc choque chez un marin : l' eau de la mer et les rayons du soleil ont dû le hâler. Il choque également chez un laboureur, qui, toujours en plein air, retourne la terre avec la charrue au soc recourbé ou avec la lourde herse. Toi aussi qui, dans les jeux, brigues la couronne de Pallas, si ta peau est blanche, on en sera choqué. [Mais] tout amant doit être pâle .. c' est le teint qui convient à l'amant ..voilà ce qui lui sied. Bien des gens pourraient croire que cela n'a jamais servi à rien. [Et pourtant] pâle était Orion, quand, amoureux de Sidé, il errait dans les bois ..pâle Daphnis, amoureux d' une naïade indifférente.La maigreur doit trahir, elle aussi, les tourments de ton âme, et n' aie pas honte de couvrir d' une petite écharpe [de malade] ta chevelure brillante. Le corps maigrit par les veilles, les soucis et la douleur qu' engendre un violent amour. Pour voir tes voeux couronnés, inspire la pitié, afin qu' en l' apercevant on dise aussitôt : <<Il est amoureux. >>

                                      

Se défier des amies :


J' ai regretté,je m' en souviens, qu' il fallût se méfier de ses amis : ce regret ne s' adresse pas seulement aux hommes. Si tu es trop confiante, d' autres femmes goûteront à ta place les plaisirs d' amour, et le lièvre que tu auras levé sera pris par d' autres. Même cette amie qui, dévouée, prête son lit et sa chambre, tu peux m'en croire, elle s'est donnée à moi plus d'une fois. N'emploie pas non plus une servante trop jolie : souvent elle a pris auprès de moi la place de sa maîtresse.

C'est un charme qu'une voix mélodieuse : que les jeunes filles apprennent à chanter (à défaut de beauté, beaucoup de femmes ont eu leur voix comme moyen de séduction) et qu'elles répètent tantôt les airs entendus dans nos théâtres de marbre, tantôt les chants du Nil avec leur rythme. Les femmes qui suivront mes conseils ne doivent pas ignorer l'art de tenir le plectre de la main droite et la cithare de la main gauche. Apprends également à parcourir légèrement de tes deux mains le nable, cet instrument joyeux : il convient aux doux ébats.

                                                                                     Traduit par Henri Bornecque, Gallimard 1924 et 1930




******************




Notes :


<<La facilité et la mobilité poétiques  d'Ovide ont fait dire qu'il était déjà plus Italien que Romain
(G. Boissier). La notation est fort juste, moyennant quelques précautions. Ovide travaille vite, mais il n' est pas un improvisateur : il a cherché constamment à éprouver son talent par des æuvres de plus en plus malaisées. Si, d'autre part, on sent en lui des signes avant-coureurs de décadence, abus d'esprit et frivolité, détachement du sujet, inégalité dans le développement, il est encore classique par son aisance limpide, et surtout par sa santé intellectuelle : sa vision est franche, sa sensibilité sans détours, sa raison intacte. Il se fie aux sens et à la psychologie... >>

 
Jean Bayet, Littérature
latine, Colin, Paris, 1965


<<Ovide,d'autre part, fut très sensible à la poésie particulière, un peu mièvre, de la vie mondaine. Et il a su  délicatement mettre en valeur, dans les épisodes rebattus des Amours, tantôt les ingéniosités,
tantôt les joies esthétiques ou le mouvement lyrique, dont un observateur se rend mieux compte qu'un cæur passionné. Sa perspicacité aussi mobile et moqueuse lui faisait saisir sur le vif des scènes de comédie mondaine, qu'il a rendues, surtout dans L' Art d' aimer, avec une délicatesse et une légèreté de touche qui accentuent certaines tendances de Térence et semblent annoncer Marivaux. >>




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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 17:31




Auteur Anonyme :

Tristan et Iseut s'éprennent l'un de l'autre d'un amour passioné après avoir bu, par erreur, un philtre magique. Le destin des amants sera tragique.



Une épopée de l'amour :

Tristan (le triste) parfait damoiseau* qui excelle aux armes et à la harpe, brave courageusement le géant Morholt. A  la suite de ce combat, il est soigné par la belle Iseut la Blonde. Revenu chez son oncle le roi Marc de Cornouailles, il est chargé de lui trouver une épouse.  Tristan pense à Iseut la Blonde. Sur la nef qui les conduit au royaume de Marc, Tristan et Iseut boivent par méprise le philtre d'amour préparé à l'intention des futurs époux.

*
autrefois, titre du jeune gentilhomme avant qu'il ne devienne chevalier

Liés par ce sort,  les amants continuent à s'aimer malgré le mariage de Marc et Iseut. Leur relation ayant été dévoilée, Tristan s'exile et épouse Iseut aux blanches mains.  A l'agonie, par suite d'un combat malheureux, il fait appeler Iseut la Blonde. Celle-ci  accourt mais essuie une tempête en mer qui la retarde. Son navire arbore une voile blanche, signe de sa venue. La jalousie pousse la femme de Tristan à lui dire que la voile est noire, signe que sa bien-aimée ne viendra pas. Tristan trépasse alors et Iseut, désespérée, s'allonge près de lui et meurt d'amour.

Un roman mythique :

Tristan et Iseut font partie du fonds légendaire celtique dit  "la Matière de Bretagne". Ce thème  a inspiré plusieurs oeuvres, dont la version de Thomas (1175) qui s'appuie sur la poésie courtoise et celle, épique, de Béroul (1190). Le récit des amours de Tristan et Iseut est celui d'une fatalité tragique. Dans un univers mystérieux, parfois merveilleux, les deux héros luttent contre un destin écrasant qui les condamne à toutes sortes d'épreuves, code de l'amour passion. Le pouvoir du philtre plonge Iseut dans l'adultère malgré elle et contraint Tristan, l'obligé du roi Marc, à la félonie. Les lois du monde semblent incontournables, puisque seule la mort libérera et réunira enfin les amants.

Ce texte haut en couleur, concilie la réalité du Moyen-Âge  et un univers enchanté. La magie a pourtant plus de pouvoir puisque c'est elle qui domine le cours des évènements. De cette victoire de la passion (amour impossible) sur le mariage (amour possible) naîtra le mythe auquel "se rattache  deux grandes traditions de la culture occidentale : le romantisme et le roman" (Denis de Rougemont).


Le retentissement de la légende fut si important que "le mythe lui même a bouleversé l'auditoire médiéval", s'il faut en juger par la façon dont les poètes des XII et XIII ème siècles se situent par rapport à l'érotique  tristanesque.
Ce roman va en effet devenir la référence littéraire de l'amour passion bien que très vite (XIII ème siècle), une tendance moralisatrice mette l'accent sur les remords et les scrupules du couple.


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Extraits :




Tristan et Iseut


Petit point sur l'intrigue :


Ce texte conclut l'histoire tragique de Tristan et Iseut, deux amoureux légendaires qui partagé une passion sans limite après avoir bu un filtre d'amour. Mais Iseut était destiné à se marier avec le roi Marc, suzerain de Tristan. Avant cet extrait Tristan avait demandé à son meilleur ami d'aller quérir Iseut, car étant mourrant, il sentait que la seule façon de guérir serait de revoir sa dulcinée. Il charge donc son ami de revenir avec elle et lui donne pour cela quarante jours. De plus son ami devait avertir Tristan du résultat de sa quête en mettant une voile blanche s'il était parvenu à ramener la belle et une noire en cas d'échec. Tristan attend, la crainte au cœur, s'accrochant à ses lambeaux de vie,  le retour du bateau. Celui-ci a été retardé par une tempête. Tristan est à l'agonie quand la nef arrive enfin. Mais sa femme, voulant se venger,  lui  annonce que la voile est noire. Donc Tristan est persuadé que Iseut a refusé de venir le voir.



Alors Tristan se tourne contre le mur et dit:
   "Que Dieu te sauve, Iseut, et me sauve ! Puisque tu n'as pas voulu venir jusqu'à moi, il me faut mourir pour l'amour de toi. Je ne puis plus tenir ma vie ; pour toi, je meurs, Iseut. Tu n'as pas eu pitié de mon mal. Mais, amie, ce m'est grand réconfort que tu auras pitié de ma mort."
  "Amie Iseut" trois fois a dit ; la quatrième il rend l'esprit.

Alors par la maison, pleurent ses chevaliers, ses compagnons, hauts sont les cris, grande est la plainte. Ils enlèvent le corps du lit, l'étendent sur le drap de soie et le couvrent d'un voile.

Le vent s'est levé sur la mer, gonfle la voile, pousse la nef jusqu'au rivage.

Iseut est sortie de la nef, entend la plainte par la rue, les cloches aux moutiers, aux chapelles, demande aux gens les nouvelles, pour qui sont sonnées ces cloches, pour qui sont versés ces pleurs.
Un ancien alors lui dit : 
   "Belle dame, que Dieu m'aide. Nous avons ici telle douleur que jamais nulle part il n'y en eut plus grande. Tristan le preux, le franc est mort. Il était large aux besogneux, secourable aux douloureux. D'une blessure qu'il avait reçue, il est mort tout à l'heure dans son lit. Jamais pareil malheur ne frappa cette terre."

Iseut entend la nouvelle, de douleur elle ne peut dire mot, elle va désaffublée, devant tous les autres, au palais. Les Bretons n'avaient jamais vu femme si belle. Tous s'émerveillent et demande d'où elle vient et qui elle est.

Iseut se rend où est le corps, elle se tourne vers l'orient, pour son ami prie piteusement.
   "Tristan, puisque je te vois mort, je ne puis ni ne dois plus vivre. Maudite tempête qui me fit si longtemps demeurer sur la mer. Si j'étais venue à temps, je t'aurais rendu la vie, je t'aurais parlé doucement de l'amour qui fut entre nous. J'eusse plaint notre aventure, nos joies, nos plaisirs, et nos peines. Je t'aurais embrassé et enlacé. Puisque je n'ai pu te sauver, puissions nous donc mourir ensemble. Puisque je t'ai trouvé mort, nous partagerons encore ce boire. ¨Pour moi tu as perdu la vie, je serais ami véritable, pour toi je veux mourir aussi."

Elle l'embrasse, près de lui s'étend, lui baise la bouche et la face, étroitement à lui s'enlace, corps à corps, bouche à bouche.

A ce moment rend son esprit.

Tristan mourut pour son désir, Iseut d'être trop tard venue ; Tristan mourut pour son amour et la belle Iseut de douleur.

Quand le roi Marc apprit la mort des amants, il vint en Bretagne. Il fit préparer deux cercueils, un de calcédoine et l'autre de béryl : Tristan fut mis en calcédoine et Iseut fut mise en béryl. Puis Marc les emporta sur sa nef. Il les fit ensevelir en deux tombeaux, de chaque côté d'une chapelle, afin que même après leur mort ils fussent séparés, mais on raconte que pendant la nuit un rosier germa du cœur d'Iseut et qu'une vigne jaillit du cœur de Tristan. Ce rosier et cette vigne crûrent si haut qu'au-dessus de la chapelle, ils entrelaçaient leurs branches, mêlant feuilles, fleurs et fruits. Par trois fois ils furent coupés, et trois fois ils repoussèrent.

Le conteur fini ici ce conte.

A tous amants,
Il dit salut : aux pensifs et aux heureux, aux envieux, aux désireux, aux réjouis, aux éperdus, à tous ceux qui m'ont écouté. J'ai dit le mieux que j'ai su ; j'ai dit toute la vérité.
Puissent les amants y trouver réconfort encontre change, encontre tort, encontre peine, encontre pleur, encontre tous les maux d'amours.

 

 

 

 

****************************

 

 

Notes :

 


 

 

La reconstitution du fil dramatique de la légende a été rendue possible grâce à la compilation de plusieurs de ses versions, souvent fragmentaires. Vers 1140, la légende celtique pénètre en France grâce à Breri, jongleur gallois introduit à la cour du comte de Poitiers. Après les premiers romans en vers de Béroul et de Thomas, Marie de France, qui a sans doute connu Thomas  à la cour d' Aliénor d' Aquitaine, compose le "Lai du chèvrefeuille" .  Les deux "Folie Tristan"  de Berne et d'Oxford, ainsi que les versions d'Eilhart d'Oberg et de Gottfried de Strasbourg ont apporté de nombreuses  précisions.


En 1230, un roman unique en prose rassemble les divers épisodes de la légende.


La pérennité du mythe est telle que le thème de Tristan et lseut est à la source d'oeuvres aussi différentes que l'opéra de Wagner de 1865 ou le scénario, en 1943, de Jean Cocteau pour le film

L' Éternel Retour, dans lequel l'histoire est réactualisée. L'ambiguïté de cette passion amoureuse, son inadéquation aux réalités présentes, son caractère illégal et amoral par rapport aux normes de l'Église posent le problème fondamental de la nature de l'amour. A ce propos, un troubadour s'écrie : "Ce n'est pas amour qui tourne à la réalité."


"Tristan et Iseut ne s'aiment pas, ils l'ont dit et tout le confirme.  Ce qu'ils aiment, c'est l'amour, c'est le fait même d'aimer."


Denis de Rougemont






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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 15:10

 

LA CHANSON DE ROLAND  : Auteur inconnu



Mort pour n'avoir pas sonné du cor :

Devant la menace d'une invasion imminente, Marsile, roi de Saragosse, promet de se convertir, lui et les siens, au catholicisme. Pour mener les négociations, Roland, neveu de Charlemagne, propose d'envoyer Ganelon, son  beau-père, pensant lui rendre hommage. Mais celui-ci ne voit dans cette ambassade qu'une embuscade et, par souci de vengeance, trahit. Il conseille à Marsile de diriger une offensive sur l' arrière garde de l'armée chrétienne où se trouvent Roland et son inséparable ami Olivier. L'ennemi se rapproche ; toutefois, Roland refuse de sonner du cor pour avertir l'empereur et rappeler le gros de l'armée. Seul, il oppose une héroïque résistance aux Sarrasins, armé de sa fidèle  épée Durendal.
Quand il se résigne enfin à rassembler les troupes, il est trop tard. Gravement blessé, après avoir tenté de briser son épée, il s'étend sous un pin, attendant que la mort le ravisse. La belle Aude, sæur d'O!ivier, meurt à son tour de chagrin en apprenánt la disparition de son fiancé. Charlemagne vengera le héros en battant les Sarrasins. Quant à Ganelon, il périra écartelé au terme d'un duel judiciaire où le représentant de Roland accule à la défaite celui du traître, rendant de la sorte manifeste le jugement divin.



Faits et gestes :


La "Chanson de Roland", la plus ancienne chanson de geste connue en France, relate les exploits de Roland, neveu de Charlemagne, face  aux infidèles. Composé de 4000 vers, ce poème raconte, basé sur des faits historique, le massacre de l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne au col de Roncevaux, le 15 août 778.

La "Chanson de Roland", long poème épique divisé en strophes, appartient au genre des chansons de geste
Elles étaient  récitées de château  en château, sur des places ou dans les foires, par des "jongleurs" qui s'accompagnaient sur une vielle.  "La Geste de Roland" compte parmi les plus anciennes et les plus célèbres, sans doute en raison du caractère exemplaire des hauts faits rapportés, mais aussi de la beauté de la langue employée. Rédigée en dialecte anglo-normand par un scripteur (l'auteur ?) signant TUROLD, elle fait partie de "La Geste du Roi", biographie légendaire de Charlemagne, "empereur à la barbe fleurie". La lutte armée qu'entreprend Roland contre les infidèles est l'occasion d'exalter les sentiments patriotiques et religieux.

Roland incarne par ses propos autant que par ses prouesses la figure du serviteur de Dieu, telle que l'encensait la féodalité chrétienne.



Extraits :

La Chanson de Roland (Extrait de la mort de Roland)

V
Car Roland sent que la mort est proche :
Par les oreilles lui sort la cervelle.
Pour ses pairs il prie que Dieu les appelle,
Et pour lui-même implore l'ange Gabriel.
Prenant son olifan dans une main, Et Durandal son épée ;
De plus d'une portée d'arbalète Il s'avance vers l'Espagne.
Au sommet d'un tertre, sous deux beaux arbres
Il y a quatre blocs de marbre luisant;
C'est là qu'il tombe à la renverse, sur l'herbe verte;
Il s'est évanoui, la mort est proche.

La Chanson de Roland (Extrait de la mort de Roland)

X
Roland frappe sur une roche bise ;
Il en abat plus que je ne saurais dire;
L'épée grince, mais ne s'ébrèche ni se brise, Rebondissant en l'air.
Quand le comte voit qu'il ne la brisera pas,
Il la plaint bien tendrement en se parlant à lui-même :
Ah, Durandal, comme tu es bonne et sainte !
Dans ton pommeau d'or sont de nombreuses reliques,
Une dent de saint Pierre, du sang de saint Basile,
Des cheveux de monseigneur saint Denis,
Du vêtement de sainte Marie;
II n'est pas juste que des païens te possèdent, C'est de chrétiens que tu dois être honorée.
Que de vastes terres avec toi j'aurais conquises,
Que tient Charles, qui a la barbe fleurie ! L'empereur est puissant et riche.
Ne soit jamais l'épée d'un couard !
Que Dieu ne permette pas à la France telle honte !


La Chanson de Roland (Extrait de la mort de Roland)

XI
Roland sent que la mort l'entreprend,
Et dans la tête et le coeur lui descend.
Dessous un pin il va courant
Et sur l'herbe verte s'allonge,
Plaçant sous lui épée et olifan,
Et regardant vers la grande Espagne;
Ainsi fait-il parce qu'il veut que Charlemagne Et tous ses soldats de son armée
Disent que le noble comte est mort en conquérant.
Il bat sa coulpe de tous ses péchés,
Et pour leur rémission, offre à Dieu son gant.


*************************

Notes :




Le XIXe siècle redécouvre les textes médiévaux. Parmi ceux-là, La Chanson de Roland suscite une admiration sans retenue : <<Dans le plus ancien qui nous reste, la sublime Chanson de Roland, quoique nous ne l'ayons encore que dans sa forme féodale, j'entends la forte voix du peuple et le grave accent des héros. >>

 Jules Michelet, Histoire de France, Bouquins, Laffont, 1981

 
Les critiques de la fin du XIXe siècle admirent la beauté de la langue employée : <<Nulle intention littéraire, nul souci de l'effet ne gâtent l'absolue simplicité du récit. Le style, tel quel, purement  éclaratif, ne s'interpose pas entre l' action et les vers : nulle invention verbale, nulle subjectivité personnelle n'adhère aux faits. Détachée à l'instant des mots qui nous les apportent, leur image réelle subsiste seule en nous : ils s'ordonnent d'eux-mêmes en une vision étrangement nette et objective : on ne lit pas, on voit. >>

Gustave Lanson, Études littéraires et morales, Slatkine, 1971

Gaston Paris, philologue spécialiste de littérature médiévale, définit en ces termes la place de La Chanson de Roland dans la production française : <<La Chanson de Roland se dresse à l'entrée de la voie sacrée où s'alignent depuis huit siècles les monuments de notre littérature comme une arche haute et massive, étroite si l'on veut, mais grandiose et sous laquelle nous ne pouvons passer sans admiration, sans respect et sans fierté. >>

Gaston Paris, Mélanges de littérature française du Moyen Age,
éditions Marie Roques, 1966

 

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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 12:00


Début de notre ère  65
Né vers 4 av J.C - Décédé 12 avril 65 ap J.C.


Le philosophe face à la mort

             


La postérité a parfois reproché à Sénèque, à juste titre semble-t-il, de n'avoir pas toujours appliqué dans sa vie les principes qu' il professait. En tout cas, cela ne peut être vrai de sa mort, qui lui fut imposée par celui dont il avait été le conseiller, Néron. Tacite nous dit que Sénèque, juste avant de boire la ciguë, eut des paroles magnifiques, restées si célèbres qu'il jugea inutile de les rapporter. Si bien qu'elles sont  aujourd'hui tombées dans l'oubli. Il en reste cependant un reflet, inspiré de Tacite, donné par Busenello, l'auteur du livret du "Couronnement de Poppée",  opéra de Monteverdi. Dans une scène sublime, entouré de ses amis et de ses disciples, Sénèque affronte la mort avec dignité et courage, faisant preuve d'un stoïcisme qui lui apporta  "la consolation contre la tyrannie et la fermeté dans l'attente de la mort" (Tacite). "Amis, dit Sénèque, l'heure est venue de mettre en pratique la vertu que j' ai tellement louée".

Suicide peine de mort

Revenons un peu en arrière. En 65, à Rome, fut découvert un complot visant à chasser Néron du pouvoir. Cette conspiration, dirigée par un haut personnage romain, Calpamius Pison, avait impliqué de nombreuses personnalités du monde civil et militaire. Accusé lui aussi, Sénèque répondit d'un ton évasif aux demandes d'explication de Néron, qui lui intima l' ordre de se tuer. Sénèque accepta la sentence du tyran avec calme pour que son geste n'apparût pas comme un acte de faiblesse et que ce suicide ne fût pas pris comme un aveu de lâcheté. Sénèque prit son temps, voulant regarder la mort en face. Il disposait d'une potion de ciguë, ce poison qu'utilisaient les Athéniens pour donner la mort aux condamnés. Après avoir réuni ses proches, après avoir écouté la lecture du "Phédon" de Platon, il but le poison. Mais la drogue, sans doute trop vieille et éventée, avait perdu de ses vertus mortelles et ne fit aucun effet. Sénèque demanda alors qu'on lui ouvrît les veines, et se fit transporter dans un bain d'eau chaude pour précipiter sa fin.

Les coulisses du pouvoir

Ces événements se déroulèrent sans doute au mois d' avril 65 ; Sénèque laissait une æuvre importante, mais inachevée, témoignage d'un homme plongé corps et âme dans l'histoire de son temps. Car le philosophe fut aussi un homme d'action. Né entre 2 et 4 après J.-C. en Espagne Bétique, il vint très tôt à Rome étudier les philosophies stoïcienne et néo-pythagoricienne ; encore très jeune, il  pratiqua l'ascétisme avec une telle rigueur qu'il mit sa vie en danger. Il fallut toute l'autorité de son père pour lui faire assouplir la discipline qu' il s' imposait. Après un voyage en Egypte, il se lança dans la carrière d'avocat, faisant preuve de qualités oratoires exceptionnelles, qui lui ouvrirent les portes de la politique. Questeur* en 31, il entra ensuite au sénat, d'abord sous Caligula, puis, après l'assassinat de celui ci, sous le règne de Claude, ou plutôt de sa femme Messaline. C'est sur son ordre du reste que Sénèque dut s'exiler, accusé d'avoir été l'amant d'une des sæurs de Caligula. Il  passa huit ans en Corse et ne put rentrer à Rome, en 49, que grâce à Agrippine, la nouvelle impératrice. Pour Sénèque, une page se tournait ; après plusieurs années passées loin du monde politique et intellectuel de Rome, il fallait retrouver les passions du pouvoir et la célébrité.

*
Les questeurs sont des magistrats Romain chargés des finances.

Précepteur d'un empereur

A Rome, le jeune Néron avait été adopté par Claude, et c' est pour devenir son précepteur que Sénèque put rentrer d' exil. Tout naturelllment, lorsque Néron succéda à Claude, mort empoisonné, le philosophe devint l'un de ses deux conseillers privés, avec Burrus. Grâce à eux, pendant près de cinq ans, Rome vécut une période de calme et de bonheur relatifs. Sénèque n'avait aucune charge publique officielle, mais il marqua le pouvoir d'une noblesse à laquelle l 'Empire n'était plus habitué. Oeuvrant pour les libertés publiques et la justice sociale, il s'opposa plus d'une fois aux idées réactionnaires du sénat. Mais les troubles reprirent, et Néron renoua avec les mauvaises habitudes de l'Empire, faisant disparaître successivement Britannicus, Agrippine et Burrus. Voyant son influence décliner, Sénèque préféra se retirer (62) et se consacrer totalement à son æuvre. Sa production littéraire fut alors très importante, même si l' on se réfère uniquement aux textes qui nous sont parvenus. Il composa notamment les sept livres du "Traité sur les Bienfaits", traité de direction morale, et les sept livres du traité scientifique intitulé "Questions naturelles" ; il commença la fameuse correspondance avec son ami Lucilius. Ses traités philosophiques et moraux - appelés faussement dialogues - relèvent d'un stoïcisme assez libre, mais font aussi appel à d'autres philosophies, comme l' épicurisme. En réalité, Sénèque ne se laissa enfermer dans aucun système. Et s'il est exagéré de dire qu'il fut proche du christianisme, en revanche,ll est indéniable qu'il influença les Pères de l'Église.

MEDEE

"M
édée" est un personnage mythologique devenu mythique. Déjà dans le monde antique, Médée est une reprise d’Euripide par sénèque, qui en fait une tragédie devenue célèbre.
R. Girard affirme que « La tragédie est l’équilibre d’une balance qui n’est pas celle de la Justice mais de la violence. » Peut-on soutenir que dans Médée
de Sénèque, qui est une référence du genre tragique, la violence constitue la tragédie sans être modérée par l’idée de Justice ?

http://pot-pourri.fltr.ucl.ac.be/itinera/Enseignement/Glor2330/Seneque/Delacroix.jpgMédée est en effet une pièce extrêmement violente, ensuite le personnage de Médée est absolu et fait figure à la fois de violence et de Justice, et enfin la notion de Justice n’est pas absente de l’œuvre de Sénèque et elle peut être apportée par le public de Médée.

Sénèque est considéré comme l’un des auteurs les plus violents du monde antique. Il n’hésitait pas à représenter sur scène des meurtres sanglants et barbares. La violence de Médée est si célèbre qu’elle a fait de ce personnage un mythe, dont le nom est encore évocateur aujourd’hui. Il existe de nombreuses versions de Médée, Sénèque s’étant lui-même inspiré d’Euripide. Pourtant, la violence de la pièce est restée toujours intacte. Aristote affirmait que la tragédie doit puiser dans la mythologie ou l’Histoire son noyau et se construire ensuite autour de ce noyau. Nul doute qu’en ce qui concerne le mythe de Médée
, le noyau est l’infanticide impitoyable.

Sénèque, dans sa tragédie, nous donne à voir une Médée terrible, qui va progressivement basculer dans l’inhumanité. En effet, l’inhumanité est la seule échappatoire à la violence insoutenable des idées et des actes de Médée. Sa violence de femme détruite, exacerbée, va la conduire à se séparer du monde. Cette violence, le monde antique ne la supporte pas et décide de ne pas l’imputer à un personnage digne de raison et maître de ses actes ; en d’autres termes, à un personnage humain. C’est au nom de ce procédé que Médée va passer successivement de l’état du dolor  (chagrin, tristesse) à celui du furor (fureur) pour finir par accomplir le néfas, le fameux infanticide. Ces trois éléments sont ceux qui conduisent à la violence suprême, ils sont un engrenage mathématique qui amène au crime le plus amoral.


Résumé : 

Après le meurtre de Pélias, Jason vivait en exil à Corinthe, avec sa femme et ses enfants. Créon l'ayant choisi pour gendre, Médée reçoit de son mari une déclaration de divorce, et du roi l'ordre de chercher un autre asile. Elle obtient un jour de délai, et envoie à Creuse, la fiancée de Jason, une robe et un collier infectés des poisons de la plus noire magie. A peine Creuse a-t-elle mis sur elle ces présents, que la robe s'enflamme, et la jeune épouse est misérablement brûlée, ainsi que son père, qui s'empresse de la secourir. Pour compléter sa vengeance, Médée égorge, sous les yeux de leur père, les enfants qu'elle avait eus de Jason, et s'enfuit à travers les airs.




Oedipe :


Œdipe est une tragédie Romaine, fondée sur la pièce de Sophocle "Oedipe Roi", mais avec de longues descriptions de la peste à Thèbes et des rituels nécromanciens et sacrificiels réalisés par le devin Tirésias.

Résume :

Œdipe étant roi de Thèbes, une peste affreuse vient désoler cette ville. Créon, frère de Jocaste, est envoyé à Delphes pour consulter l'oracle d'Apollon sur les remèdes à opposer à ce fléau cruel. Le dieu répond que la peste ne cessera pas ses ravages tant que la mort de Laïus n'aura pas été expiée par l'exil du meurtrier. Œdipe ordonne alors au devin Tirésias de chercher à découvrir, par la divination, l'assassin du roi. Le vieillard aveugle, aidé de sa fille Manto, interroge les entrailles des victimes : ce moyen ne réussissant pas, il emprunte le secours de la magie pour évoquer des enfers l'ombre de Laïus, qui déclare que c'est Œdipe lui-même qui est le meurtrier. La vérité connue, Œdipe, voyant qu'il est devenu l'assassin de son père et le mari de sa mère, double crime dont l'avaient menacé les oracles, tourne sa fureur contre lui-même, s'arrache les yeux, et se condamne à l'exil. Jocaste se frappe d'une épée.


Notes :

<<Les penseurs chrétiens étaient surtout fascinés par la description des efforts que faisait cet homme pour purifier son âme, la mettre en présence de Dieu. Ils savaient que, chaque soir, Sénèque se livrait à un examen de conscience, pour porter un jugement sur les actions accomplies pendant la journée, et les accusations d'orgueil, que l'on peut porter contre le stoïcisme lui-même, sont démenties chez Sénèque par
des aveux modestes.>>

P. Grimal, Sénèque - PUF - 1981




<<S' il y a une philosophie proprement romaine, elle n'est à chercher ni dans Cicéron l' éclectique, ni dans Lucrèce l' épicurien étranger à sa société et à son temps, ni davantage dans Épictète et Marc Aurèle qui, Romains d'adoption ou de naissance, étaient de langue ou de culture grecques ; s'il y a une philosophie
romaine, c'est à Sénèque et à peu près à lui seul que nous la devons.>>

P. Aubenque et J.-M. André, Sénèque, Éditions Seghers, 1964

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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 11:00


Vers 70 - 19 av J.C.


Une enfance à la campagne

Publius Virgilius Maro, considéré comme le plus grand des poètes latins, est né près de Mantoue, en 70 av. J-C.  Loin des désordres politiques incessants qui secouent la République, le jeune Virgile grandit dans un cadre rural. S'il ne choisit pas la carrière politique, c'est sans doute que les troubles qui agitent Rome le révulsent ; la guerre civile engagée entre César et Pompée (49), bientôt suivie du meurtre de César (43) et  de la  bataille pour sa succession, ont tôt fait de le convaincre de la vanité d'un engagement au service de la Cité. Étudiant à Rome, il se lie au cercle des poètes : il devient le familier de Varus, de Gallus, d'Horace. Le retour à sa terre natale n'est qu'un bonheur fugitif : car, en pleine guerre civile, on lui arrache son domaine. C'est alors que Virgile compose et publie à Rome, en 37, "les Bucoliques".

http://www.memo.fr/article.asp?ID=PER_ANT_008#Som1



Dans les Bucoliques, Virgile dit que l'art poétique est comme l' art du vannier : il noue entre eux les mots et les vers, inventant des symétries, des correspondances, qui témoignent d'une recherche esthétique très soignée.


Virgile, poète pastoral
 
Recueil d'églogues (
poème de style classique consacré à un sujet pastoral. Les poèmes de ce genre littéraire sont parfois qualifiés de « bucoliques ».), les "Bucoliques" sont empreintes de nostalgie. Le paysage naturel de son enfance, lieu d' origine du poète et constitutif de son identité, devient objet poétique. Or, derrière le caractère formel et champêtre du poème qui emporte le lecteur parmi les bergers apparaît aussi une peinture subtile des sentiments, où l'amour n'est point égarement de l'âme mais admiration et déchirement face à l'être aimé.
Toutefois, Virgile n'inaugure pas simplement une conception nouvelle de l'amour. En effet, les bergers de Virgile dénoncent les guerres civiles qui les contraignent à l' exil . Ce serait le temps retrouvé d'un nouvel âge d'or qui, espéré d'abord, ne trouvera pas d'achèvement réel.
Oeuvre contrastée, les "Bucoliques" témoignent pourtant d'un rare espoir en l'homme, quand bien même est soulignée l'impossibilité  de la poésie, médiatrice entre la Nature et l'homme, à infléchir le cours des événements. La publication des "Bucoliques" confirma le succès de Virgile auprès de ses amis romains, dont il avait prêté certains traits aux bergers de son recueil. Dès lors connu et reconnu, il reçut d'Octave (qui deviendra quelques années plus tard l'empereur Auguste) un nouveau domaine, en Campanie. C'est là qu'il termina, en 29, "les Géorgiques".


Virgile, poète de l'homme au travail

En écrivant les Géorgiques, Virgile ne rompt pas avec les Bucoliques. La thématique littéraire, organisée autour de la Nature, reste présente. Simplement, elle s'inscrit dans une démarche différente. Le travail de la terre est le sujet apparent de ce livre. Néanmoins, le travail porte avec lui une symbolique riche de sens : le paysan trace le sillon d'un avenir authentique, loin des utopies d'un âge d' or paisible.
Car si paix il doit  avoir, ce ne peut être que la paix de l'homme réconcilié avec l'ordre du cosmos, adorant de sages et protectrices divinités. Oeuvre documentée (les techniques agricoles y sont présentées abondamment), les Géorgiques rappellent que Virgile est homme de son temps, où était en vogue une poésie toute didactique. Mais plus que cela, l' oeuvre révèle un Virgile novateur, attaché à célébrer les vertus de l'homme au travail dans une Cité qui aspire à retrouver la concorde.

Virgile, poète de la grandeur de Rome

 
L'Empire reconnaît l'autorité d'un empereur incontesté, Auguste. Virgile compose "L' Énéide" à partir de 30. L'histoire d'Énée, héros troyen en exil et à la recherche d'une nouvelle patrie, n'est pas une création de l'auteur. En effet, une légende romaine veut que la fondation de Rome ait une origine troyenne. Virgile a donc utilisé une histoire existante dont il a fait un chef-d'oeuvre poétique, où Énée, au terme d'une épopée digne d'Homère, jeté par les dieux sur les rivages africains, aborde enfin au Latium. Le choix de Virgile ne doit rien au hasard : s'il peint Énée, héros de légende, ce n' est pas pour fuir le temps présent. Tout au contraire, L' Énéide nous ramène constamment à l'actualité de l'Empire d' Auguste. Dans ce long poème, les hommes et les dieux, l' Asie et l'Occident romain, les dieux eux-mêmes, vivent en paix, annonçant la grandeur de l'Empire, foyer d'une pacification retrouvée. "L' Énéide" est ainsi le miroir prospectif de ce que deviendra  l'<<Urbs* >>. Elle est l'aboutissement de l' oeuvre du poète : la réconciliation  de l'homme avec la Cité, avec son histoire et son avenir,  recherchée dans "les Bucoliques**", entrevue dans "les Géorgiques**", atteint son achèvement
dans "L' Énéide". Ce dernier poème que nous a légué Virgile n'est pourtant pas terminé. Car, parti pour la Grèce afin d'authentifier certains détails de l'oeuvre, Virgile fut soudain frappé d'insolation à Mégare. Ramené rapidement en Italie, à Brindes, il ne peut être sauvé. C'est là qu'il meurt le 21 septembre de l'an 19 av. J-C., sans avoir pu parfaire son oeuvre majeure.

*L'Urbs est un mot latin qui signifie « la  ville ». Ce terme, ayant une connotation d'excellence, sera utilisé durant l' antiquité romaine pour symboliser « la ville d'entre toutes les villes », Rome. L'Urbs, jusque vers 350, désigne le pomœrium, partie intra-muros de la cité, espace de décision politique, siège du gouvernement et centre de spiritualité de l'Empire. Autour de l'Urbs, à mille pas, se trouvent les continentia, les faubourgs.

**
  http://www.memo.fr/article.asp?ID=PER_ANT_008#Som1


Extrait 


L'Enéide :

Didon, reine de Carthage, a écouté avec passion les récits Énée. Elle aime désormais le héros. Virgile représente avec la précision d'un clinicien et la chaleur d'un poète les égarements de l'amour. Comme la plupart des Anciens il voit dans cette conduite les effets d'une véritable maladie physique qui entraîne un profond désordre de l'âme.

Didon, dans toute sa beauté, la patère à la main, verse elle-même le vin entre les cornes d'une blanche génisse ou devant les images des dieux fait d'un pas grave le tour de l'autel humide de sang (1). Elle renouvelle ses sacrifices comme si le jour recommençait et penchée, les lèvres béantes, sur les flancs ouverts des victimes, elle consulte leurs entrailles palpitantes. Hélas, que les haruspices sont ignorants (2)! Que servent à une âme passionnée les voeux et les temples l La flamme dévore ses tendres moelles et la silencieuse blessure se creuse dans son coeur. La malheureuse Didon brûle et va, errante, égarée, a travers toute la ville. Ainsi la biche atteinte à l'improviste d"une flèche que, de loin, dans les bois de la Crète, le pâtre qui la poursuivait a lancée : elle emporte avec elle, sans qu'il le sache, le fer ailé, et elle fuit, elle parcourt les forêts et les fourrés dictéens (3) ; mais le mortel roseau demeure attaché à son flanc. Tantôt la reine conduit Énée au milieu de la ville ; elle lui montre avec orgueil les ressources de Sidon (4) et de la cité prête à le recevoir.  Elle commence une phrase et tout à coup s'arrête. Tantôt,  à la tombée du jour, elle veut retrouver le même banquet que la veille et dans son délire redemande au Troyen le  récit des malheurs d'Ilion (5) et de nouveau reste suspendue à ses lèvres. Lorsqu'on se sépare, lorsqu'à son tour la lune pâlissante amortit son éclat et que le déclin des astres conseille de dormir, seule et triste dans sa maison déserte elle se jette sur le lit qu'il a quitté. Absente, absent, elle le voit, elle l'entend, ou elle retient dans ses bras Ascagne, séduite par sa ressemblance avec son  père pour essayer de tromper son indicible amour. Les tours commencées ne s'élèvent plus ; la jeunesse ne s'exerce plus aux armes ; le port et les ouvrages de défense sont  abandonnés ; tous les travaux s'interrompent, demeurent suspendus, et les énormes menaces des remparts et les échafaudages qui atteignaient les cieux (6).

                                                                             Éneide, IV, 60-89 TRAD. A. BELLESSORT (Les Belles Lettres)


1 Virgile décrit les rites des sacrifices latins.
2 L'haruspice est un sacrificateur qui prédit l'avenir par l'examen des entrailles des victimes : les         Romains  n'avaient qu'une confiance limitée en ses talents...
3 Du mont Dicté, en Crète.
(4) Didon est venue de Tyr, colonie de Sidon.
(5) Autre nom de Troie.
(6) La ville de Carthage est alors en pleine fondation ; les Anciens conçoivent la cité comme un organisme :  tout dérangement du centre de décision, du cerveau, le frappe gravement. Ainsi cesse  l'activité d'une ruche quand sa reine dépérit.


Notes :


"Virgile, né et grandi dans les plus sombres années de Rome, a vu de son vivant s'instaurer, s'affirmer, par le règne rayonnant d' Auguste, l'âge d'or qu'il avait toujours annoncé (...). Qu'a-t-il donc vu, qu'annonçait-il, qu'a-t-il saisi que nous-mêmes, avec deux mille ans en plus, n' entrevoyons qu'à grand-peine ? (...) C'est nous devant lui, c'est le monde qu'il regarde ; il semble discerner au travers quelque être réel et qui ne l'épouvante pas".

Jacques Perret, Virgile, Seuil, " Écrivains de toujours >>,1969

"Déjà célèbre en son temps, tenu en haute estime par l'empereur Auguste, Virgile est apparu très tôt comme le plus grand poète de Rome. Il l'est assurément par la perfection technique de tout ce qu'il a écrit, par l'étendue de sa sensibilité, la profondeur de ses intuitions. De surcroît, les Romains ont eu l'impression
de recevoir de lui l'image idéale qu'ils avaient à se former d'eux mêmes. Après la dislocation de l'Empire, il est demeuré le représentant le  plus éminent de l'humanité romaine, voire des grandeurs de l' âme païenne ; c'est à ce titre qu'il tient tant de place dans l'oeuvre de Dante. Aux temps modernes, sa gloire n' a guère subi d'éclipses ; chaque époque littéraire, chaque âge de la sensibilité trouvant des raisons de s'intéresser à lui. >>.

Jacques Perret, " Virgile ",Encyclopédia Universalis

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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 10:40


106 - 43 av J.C.


A 63 ans, Cicéron fait à un vieil ami, sur un ton de confidence, l'éloge de la vieillesse. Il lui explique pourquoi elle n'est pas un fardeau et comment affronter calmement l'approche de la mort.




"La faiblesse convient à l'enfance ; la fierté à la jeunesse ; la gravité à l'âge mûr ;  la maturité à la vieillesse : ce sont autant de fruits naturels qu'il faut cueillir avec le temps. Une jeunesse intempérante et débauchée ne transmet à la vieillesse qu'un corps épuisé".

A travers l'apologie qu'il fait de la vieillesse, c'est sa conception de toute la vie humaine que le célèbre orateur latin nous livre dans cet ouvrage.


Un grand bel âge :


<<Ce fardeau qui nous est commun à tous, cette vieillesse qui déjà nous presse ou au moins nous menace, je veux l'alléger pour vous et pour moi... >>: l' orateur et écrivain latin Cicéron a 63 ans quand il dédie à son ami Atticus, 66 ans, un dialogue imaginaire entre un célèbre notable romain, Caton le censeur (83 ans) et deux jeunes gens, Laelius et Scipion.

Ceux-ci s'étonnent en effet de voir ce vieillard supporter allègrement un âge qui pour d'autres est <<plus pesant que l'Etna>>. L'ouvrage évoque les quatre principaux handicaps qui sont liés à la vieillesse :
 l' éloignement de la vie professionnelle, les infirmités, la privation des plaisirs et, surtout, la peur de mourir. Tous ces handicaps peuvent être aisément surmontés selon Cicéron. S'appuyant sur d'illustres exemples - Solon, Sophocle ou Platon -, l'écrivain met en évidence le rôle de guide et de conseiller des sages vieillards auprès des jeunes, rôles qui devraient les consoler de leur inactivité sur le plan professionnel ; il insiste sur  l'importance que peuvent avoir les travaux de l'esprit, car "<<si trop d'exercice alourdit le corps, l'âme n'en devient que plus légère>>, ainsi que sur les joies réservées à l'homme désormais affranchi des passions - délices de la conversation ou de la vie des champs par exemple.

Quant à la mort, "si elle anéantit notre âme, pourquoi s'en inquiéter ? Si au contraire elle doit la conduire dans un lieu où elle sera éternelle, ne faut- il pas la souhaiter ? "  Que l'on déplore la mort d'un jeune homme, "flamme ardente qu'on étouffe à force d'eau", c'est tout naturel, mais pourquoi pleurer sur un "feu qui s'éteint faute d'aliment"  ? D'autant qu'en s'exprimant par la bouche de Caton, Cicéron se dit convaincu de l'immortalité de l'âme.

Un ton de confidence :

Comme toujours, l'orateur, habitué des prétoires, cherche à convaincre par des images suggestives autant que par le raisonnement. Mais ici la rhétorique cède le pas à la confidence chaleureuse. Cicéron met toute sa sincérité et son amour de la vie dans ce texte où passe une réelle émotion - nostalgie passagère à propos de la perte de l'éloquence ou de la mort d'un fils, ou émerveillement face à la nature.


Extraits :

Quand l'orateur devient professeur :


Quant à l'orateur, je crains qu'il ne faiblisse en vieillissant, car l'éloquence ne demande pas seulement du génie, il lui faut encore des poumons et des forces. Quelquefois cependant, je ne sais par quel privilège, la voix conserve tout son éclat jusque dans la vieillesse : moi-même je ne l'ai pas encore perdue, et vous savez mon âge. Il y a d' ailleurs quelque chose d'imposant dans la voix calme et grave d'un vieillard, et s'il sait manier la parole, sa diction douce et polie le fait facilement écouter. Et quand même il ne pourrait obtenir ce succès, il peut au moins instruire Scipion et Laelius. Quoi de plus aimable qu'un vieillard entouré de jeunes gens empressés et studieux !

***

Plaisirs des vieillards : La conversation et la table

 Pour moi j' aime ces repas que prolonge le charme de la conversation ; je les aime non seulement avec les hommes de mon âge, dont il ne reste plus qu'un bien petit nombre, mais avec ceux du vôtre et avec vous :
j' ai même une grande obligation à la vieillesse qui m' a donné plus de goût pour la conversation et m'en a ôté pour le boire et le manger. Si cependant on trouve quelque charme aux plaisirs de la table... je ne comprends pas  pourquoi la vieillesse serait privée de cette sorte  de jouissances... J'aime, je l'avoue... ce discours que le roi du festin  prononce à la manière de nos pères, le verre en main ; j' aime... ces petites coupes qu'on vide goutte à goutte ; le frais en été, en hiver le soleil ou le coin du feu.



Cicéron est lyrique quand il parle de la vigne :

C' est un plaisir dont je ne peux me rassasier... La vigne, faible de sa nature, et qui ramperait sur le sol, si elle n'était soutenue, se sert, pour s'élever, de ses vrilles, comme d'autant de mains, et embrasse tout ce qu'elle rencontre ; comme elle s'échappe de tous côtés en jets vagabonds et multipliés. Aussi, au retour du printemps, voit-on sur les ceps épargnés poindre ce qu'on appelle le bourgeon, où bientôt la grappe va se montrer  :  celle-ci,fécondée par les sucs de la terre et la chaleur du soleil, est d'abord âpre au goût, puis elle s'adoucit en mûrissant et, à l'abri du pampre qui la couve, elle conserve une douce chaleur, sans avoir à craindre les feux brûlants du soleil.

Mieux vaut croire en l'immortalité :

Si je me trompe en croyant que les âmes des hommes sont immortelles, j'ai du plaisir à me tromper et veux pas qu'on m'arrache une erreur qui fait le bonheur de ma vie. Si, comme le pensent quelques petits philosophes, je ne dois rien sentir après ma mort, je n'ai pas à craindre que ces philosophes, morts comme moi, se moquent de ma crédulité....

 

 

Traduction de V. Paret et A. Legouëz   1893





***********************


Notes :



Bien que l'on ne soit pas absolument certain de la date, les historiens estiment que ce dialogue sur la vieillesse a été composé en 44 av. J-C., César venait de mourir et ses vétérans accusaient le célèbre orateur et écrivain de s'être réjoui de la mort de leur général. Cicéron craignait pour sa vie et changeait souvent de domicile, habitant tour à tour l'une de ses nombreuses maisons de campagne.

Dans leur préface à une traduction qui date de 1893, les latinistes V. Paret et A. Legouëz voyaient dans ce texte sur  la vieillesse (en latin De Senectute) l'un des ouvrages les plus parfaits de Cicéron,
<< bien supérieur >> même à leurs yeux au Dialogue sur l'amitié :

<<La division en est claire, la marche facile, les développements ingénieux, et quelquefois touchants>>.  Ils constatent toutefois que son apologie est incomplète, Cicéron ne songeant le plus souvent qu'à la vieillesse de l'homme d'État... Il n'a pas même nommé les femmes, que d'ailleurs il a également oubliées dans le traité "Des Devoirs"  et dans le "Dialogue sur l'amitié".


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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 10:31



384 - 322 av J.C.


Aristote fut le premier philosophe à tenter d'organiser la totalité du savoir humain et représenta pendant longtemps les limites de la science humaine : il fallut en effet attendre la Renaissance et Descartes pour voir sa philosophie remise en question.

Né en 384 à Stagire, colonie des Chalcidiens, située à l'extrémité nord-est de la Chalcidique, Aristote fréquenta à Athènes l'Académie dès l'époque où Platon s'absentait pour la deuxième fois en Sicile. Il y fut le  disciple d'Héraclide du Pont, mais se lia bientôt d'amitié avec Platon lui-même à qui il demeura toujours attaché. L'affirmation qu'il lui "doit presque tout" (A. Rivaud) n'a rien d'exagérer, et le Stagirite  (de Stagire en Macédoine), n'aurait jamais laissé entendre le contraire. Toute allusion à une opposition quelconque entre maître et élève au sein de l'Académie serait, par conséquent, fondée sur des rivalités ultérieures entre disciples lointains des deux philosophes.

A l'âge de trente-sept ans, Aristote assuma en quelque sorte des fonctions de liaison entre la cour macédonienne et celle d'Assos, en Asie Mineure, où il s'était rendu avec son condisciple Xénocrate et son élève, le jeune Théophraste, auprès d'Hermias, tyran éclairé de cette ville. Trois ans plus tard, les trois compagnons quittèrent la région pour rentrer à Athènes, non sans avoir effectué un séjour d'études à Mytilène. C'est dans sa retraite macédonienne que, vraisemblablement gagné à l'idée de l'hégémonie de Philippe II sur la Grèce entière, il conçut le projet de rassembler des études sur les constitutions des villes grecques, projet qu'il réalisa après 330, longtemps après son retour à Athènes et la fondation de son école. Cette dernière ne fonctionna qu'en 335, alors qu'Aristote atteignait presque la cinquantaine. Située dans le quartier du Lycée, qui devait son nom au voisinage du gymnase d'Apollon Lycien, cette école en reçut tout naturellement le nom. Platon, qui fut le maître d'Aristote, avait quarante-quatre ans de plus que lui, fréquenta à Athènes l' Académie dès l'époque où Platon s'absentait pour la deuxième fois en Sicile. Il y fut à l'époque
  vivaient  le célèbre sculpteur  d'Aristote, Praxitèle et l'homme politique et orateur Démosthène, qui se forçait, dit-on, à déclamer avec des cailloux dans la bouche.
 

Amicus Plato, sed....

Avec Platon, son maître, Aristote fut incontestablement le plus grand philosophe grec et même le plus remarquable de tous les temps. C'est lui qui a fondé la logique, l'histoire de la philosophie, l'anatomie et la physiologie comparées,  s'intéressant en outre à la politique, à la physique, à la métaphysique, à l'art dramatique, aux sports olympiques, bref à toutes les sciences et à tous les arts qu'un homme pouvait dominer dans l'antiquité.
A l'âge de dix-sept ans, Aristote se rendit à Athènes pour y poursuivre ses études. Il y écouta les discours d'Isocrate, l'auteur du célèbre "Panégyrique" *
puis il suivit l'école de Platon, à l'Académie,  lorsque celui-ci fut revenu de Sicile, en 347.  Même s'il ne fut pas toujours d'accord avec son maître, il ne cessa de lui témoigner admiration et respect ; mais comme le dit le fameux adage, "amicus Plato, sed m:agis amica veritas"  c'est à dire qu'il était ami de Platon mais un plus grand ami de la vérité.
Pendant ces vingt années passées à Athènes, Aristote,sans jamais abandonner l'Académie, travailla aussi pour son propre compte et ouvrit une école de rhétorique
. Il était un travailleur infatigable , qui ne souhai tait pas perdre trop de temps à dormir : pour réduire son temps de sommeil, dit-on, il prenait dans sa main une boule de bronze avant de s'endormir et la tenait au-dessus d'un récipient dans laquelle elle ne man quait pas de tomber avec fracas.

*
L’éloge panégyrique ou simplement le panégyrique, du latin emprunté au grec panêguris, "assemblée de tout le peuple", est au sens strict un discours public à la louange d'un personnage illustre, d'une nation, ou d'une chose et, dans l'occident chrétien, un sermon faisant l'éloge d'un saint. Le terme a pris aujourd'hui le sens plus général de louange ou d’apologie, et s’utilise parfois dans le sens péjoratif d’éloge emphatique ou exagéré.

Précepteur d'un roi :

En 347, à la mort de Platon et déçu de ne pas avoir été nommé à sa succession, Aristote quitta Athènes. Il fut d'abord ambassadeur à la cour du roi de Macédoine, Philippe, dont il était proche. Puis, il se rendit en Asie Mineure, auprès d'Hermias, tyran d'Atarné, qu'il avait connu à Athènes. Sa mort, conséquence de la rivalité qui opposait les deux puissances d'alors - la Macédoine et la Perse - affecta grandement Aristote qui consacra un hymne à la vertu destiné à celui qui avait été son élève : "C'est par amour pour ta beauté qu'un citoyen d'Atarné, illustre par ses grandes actions, a perdu la vie. Les Muses, filles de Mnémosyne, immortaliseront son nom, elles qui exaltent l'amitié".

Après avoir épousé une jeune femme qui était la nièce ou la fille d'Hermias, il se rendit tout d'abord à Mytilène (sur l'île de Lesbos), puis rentra en Macédoine (342), Philippe lui ayant demandé de s'occuper de l'éducation de son fils Alexandre, le futur Alexandre le Grand. Le jeune prince était alors âgé de treize ans, et Aristote essaya de développer chez lui les qualités qui conviennent à un futur souverain : la modération et la raison. Y parvint-il ? Pas tout à fait si l'on s'en tient à ce constat d'Aristote lui-même : "Une étrange hérédité semble avoir jeté, dans l'âme de ce prince, un orgueil démesuré, un désir manifeste de se faire ranger au nombre des Dieux".

Malgré cela, un lien amical rapprocha les deux hommes : Alexandre favorisa les travaux scientifiques de son maître et,  profitant de ses expéditions en Asie, il lui fit envoyer toutes sortes de plantes et d'animaux, qui permirent notamment à Aristote d'écrire son traité sur "La Nature des animaux". Cette liaison ne connut aucune ombre jusqu'à la mort du neveu d'Aristote, Callisthène. Celui-ci avait remplacé le grand philosophe à la cour d'Alexandre, mais ne put dissimuler son attachement  à la politique panhellénique (
qui rassemble, réunit  tous les Grecs . .. La guerre de Troie fut le résultat d'union panhellénique) alors qu'Alexandre avait opté pour l'Asie. Il fut condamné à mort et livré aux bêtes.

Une grande école :

Aristote rentra à Athènes (335) pour y fonder l'école du Lycée, ainsi nommée parce qu'elle se trouvait près du temple d'Apollon Lycien. Cette école était aussi appelée "péripatéticienne" (du  grec peripatein, se promener), car Aristote avait pour habitude de dispenser son enseignement à ses élèves en se promenant. Le matin, les leçons étaient réservées à un public d'initiés ; l'enseignement, purement théorique, était dit acroamatique**
ou ésotérique (<<l'ésotérisme désigne un ensemble de mouvements et de doctrines relevant d'un enseignement caché, souvent accessible par l'intermédiaire d'une « initiation ») . Le soir, le public était plus large , car l'enseignement, dit exotérique *** était alors plus accessible. Une place de choix était accordée à la rhétorique, degré supérieur de l'enseignement, une sorte d'exercice d'éloquence sur des sujets divers, par exemple politiques, juridiques ou philosophies. Il ne s'agissait pas simplement de faire de beaux discours, mais bien de perfectionner un véritable art, celui de convaincre un auditoire, qui reposait sur cinq parties : l'invention (recherche  des idées),  la disposition (structure), l'élocution (style),  la mémoire et l'action (intonations et attitudes).

**
Terme d'antiquité. Qui est reçu par l'oreille. L'enseignement acroamatique est l'enseignement oral, par opposition à l'enseignement par les livres. De là il a pris aussi le sens de profond, le maître communiquant de vive voix à des élèves choisis un enseignement qu'il ne mettait pas dans les livres et pour l'usage du vulgaire

*** Le terme exotérisme, utilisé surtout en son adjectif "exotérique", s'est pour la première fois appliqué aux dialogues (Eudème, Protreptique...) d'Aristote pour indiquer ce qui est public par opposition à ce qui est initiatique. Il désigne également les cérémonies publiques (religieuses, rituelles) dans leurs manifestations et non dans leurs significations (ésotériques celles-là).

L'exotérisme fait, par ce lien avec l'ésotérisme, partie des sciences traditionnelles.

 

A la mort d'Alexandre, Aristote quitta Athènes, Démosthène ayant déclenché une violente campagne anti macédonienne. Comme il ne voulait pas subir le même sort que Socrate, et soucieux, selon ses propres paroles, "d'épargner aux Athéniens un second attentat contre la philosophie", - il fut effectivement condamné à mort par contumace - il se retira à Chalcis, dans l'île d'Eubée, où il mourut en 322.

Son oeuvre considérable nous est parvenue en partie sous la forme de notes prises par ses élèves et par son disciple Théophraste.  


Métaphysique : par Aristote

"La recherche d'un système philosophique complet qui apporte la réponse à toutes les questions."

Le mot "métaphysique" vient de l'expression grecque "meta  ta physika" c'est à dire "après le traité de physique". C'est en effet le titre que met Aristote en tête de ses réflexions sur l'Être, réflexions qui prennent place dans son oeuvre après ses études sur la physique.

Parmi les nombreux livres écrits par Aristote, plus de mille selon la tradition et dont fort peu sont parvenus jusqu'à nous, quatorze forment ce que l'on appelle "la Métaphysique". Ces textes furent réunis seulement au Ier siècle av J.C., mais il ne semble pas qu'Aristote ait pensé à les réunir, encore moins à leur donner ce titre : ce ne sont que des notes de cours, de style généralement lapidaire et dans lesquelles il recherche la définition d'une "philosophie première" qui aille plus loin que la physique à laquelle il a consacré des traites.


Ontologie et théologie :

Ayant étudié dans ses autres ouvrages le monde qui l'entoure, Aristote tente, dans les considérations de la "Métaphysique",de définir la science qui s'occupe de l'Être et de ses caractéristiques, d'une manière qui dépasse le particulier. Il envisage d'ailleurs deux directions entre lesquelles  il ne prend pas parti. Tout dépend de la façon  dont on envisage l'Être : ou l'on s'intéresse à l'Être dans son universalité, à la substance, à partir de laquelle tous les cas particuliers deviennent alors explicables, et l'on pratique alors ce que le philosophe appelle l'ontologie (étude  de l'Être en tant qu'Être,
c'est-à-dire l'étude des propriétés générales de tout ce qui est), où l'on s'intéresse à l'Être transcendant, au meilleur, à l'Être divin et l'on pratique la théologie : l'Être est alors vu sous la forme d'un acte pur, Substance première, "Pensée-qui-se-pense", le monde s'organisant et se mouvant en harmonie grâce à l'attrait que cet Être divin exerce éternellement sur toute chose.

Ces deux termes, "ontologie et théologie", inventés par Aristote,constituent depuis l'antiquité deux domaines essentiels d'étude pour les philosophes, notamment pour les penseurs chrétiens (Saint Thomas d'Aquin) qui ont tenté de réaliser une synthèse unissant pensées antique et chrétienne dans un même système.



**************


Notes :


Les grandes oeuvres  d' Aristote furent retrouvées par hasard, cachées dans une cave. Elles furent éditées par  Andronicus de Rhodes au Ier siècIe avant J.-C. déjà. Ensuite, c'est grâce aux Arabes, en particulier à Avicenne et à Averroès, que l'héritage d' Aristote fut transmis au Moyen Age. Saint Thomas d'Aquin fit de
l' aristotélisme****
la doctrine officielle de l'Église.

****
L'aristotélisme est le nom donné à la doctrine dérivée des œuvres d'' Aristote

Les principales oeuvres d' Aristote sont avant tout les quatre traités de morale : "Éthique à Nicomaque," "Éthique à Eudème", "Grande Morale", "Traité des vertus et des vices". Mais il faut citer aussi "La Constitution d'Athènes,"  "L'Organon",  "La Physique" , "Le Ciel",  "La Mécanique",  "La Poétique",  "La Politique",  "La Météorologie"  et  "La Métaphysique."

<<Aristote est un  prodigieux génie, mais abstrait, subtil et épineux. Il se plaît aux discussions elliptiques, aux allusions obscures, à ces  raisonnements dont on ne sait s'ils ne sont pas décidément sophistiques et fallacieux. Il aime les formules  tellement  tassées qu'elles deviennent énigmatiques. Avec cela, comme son érudition est énorme, il discute, parfois en nommant leurs auteurs, mais souvent sans les nommer, les doctrines les plus diverses en les supposant connues. Tout cela contribue à faire de la lecture de ses oeuvres un travail de telle nature que, malgré les commentateurs anciens et  modernes, on ignore souvent si l'on s'est rendu maître de sa pensée et de son argumentation. >>

A.Cresson, Aristote, sa Vie, son æuvre, PUF, 1963





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16 août 2009 7 16 /08 /août /2009 20:29



PLATON : 427 - 347 av J.C.
 

"Apologie de Socrate" : 

 

 

Socrate  avait soixante dix ans lorsqu'il fut accusé de corrompre la jeunesse, de ne pas reconnaître les dieux de l'Etat  et d'introduire de nouvelles divinités. Ces trois griefs méritaient la peine de mort.

 

La défense de Socrate n'est pas un plaidoyer. C'est une apologie : l'édification d'un personnage, et, par-dela la réalité historique, le manifeste de tout philosophe.  Platon établit en effet, le statut du sage. Socrate est le martyr de sa propre quête.

 

 

Socrate se défend :

 

Comparaissant pour la première fois devant la justice, Socrate s'excuse d'abord d'être étranger au langage des tribunaux. Aussi ne cherchera-t-il ni feinte ni artifice. On dit qu'il cherche à corrompre la jeunesse. Il n'a jamais fait payer de leçons. Il n'a eu  que des entretiens et laissait à chacun la liberté de l'entendre. On dit qu'il cherche à pénétrer les secrets  de la nature. Mais il n'entend rien aux sciences. Pourquoi le ferait-il ? Parce qu'un oracle  à Delphes l'a proclamé  l'homme le plus sage de la Cité. Il voulait  s'assurer que ce fût vrai. Il a interrogé les hommes les plus sages pour s'apercevoir qu'ils ne l'étaient pas. Sa supériorité est que, n'étant pas sage, il ne croit pas non plus qu'il l'est.

 

Ceux qui l'ont entendu l'ont suivi et imité. Est-ce bien là de la corruption ? S'il corrompt réellement la jeunesse, c'est involontairement. Il ne mérite qu'une correction, non une condamnation. Pour répondre à l'oracle, il s'est donné la mission d'exciter les Athéniens à la vertu. Son entourage ne s'en plaint pas sans quoi il se lèverait pour l'accuser aussi. Il s'en remet donc à la décision du dieu et des juges.

 

*********************

 

Socrate choisit sa peine :

 

 

Il est déclaré coupable. La juridiction veut que l'accusateur et l'accusé choisissent une peine. Les juges doivent trancher. Les adversaires du philosophe demandent la mort. Socrate, n'ayant jamais fait de mal, ne comprend pas. D'ailleurs, ses services rendus méritent une récompense : il propose qu'on le nourrisse au prytanée*.

 

  *"Terme d'antiquité grecque. Édifice où s'assemblaient les prytanes, et qui servait à différents usages civils et religieux. à Athènes, les prytanes, des ambassadeurs revenus de mission, des citoyens qui avaient rendu des services, des généraux victorieux étaient nourris dans le prytanée aux frais de l'État. Je me condamne [dit Socrate] à être nourri le reste de mes jours dans le prytanée aux dépens de la république."

 

 

Socrate est condammé à mort :

 

S'adressant à ceux qui le jugent, il regrette qu'ils n'aient pas la patience d'attendre sa mort, à lui, un vieillard de soixante-dix ans. Ils se sont chargés d'un crime bien inutile. A ceux qui l'ont absous, il confie la charge de ses enfants et leur demande de les aider à préférer la vertu aux richesses.  "Et maintenant, achève-t-il, voici l'heure de nous en aller, moi pour mourir, vous pour vivre. Qui de nous a le meilleur partage, nul ne le sait excepté le dieu".

 

Extraits :

 

IX.-Ce sont des enquêtes. Athéniens, qui ont soulevé contre moi tant de haines si amères et redoutables. et c'est de ces haines que sont venues tant de calomnies et cette renommée de sage qu'on m'a faite ; car ceux qui m'entendent s'imaginent toujours que je sais les choses sur lesquelles je démasque l'ignorance des autres. Mais il y a bien des chances, juges, que le dieu soit réellement sage et que par cet oracle il veuille dire que la sagesse humaine n'est pas grand-chose ou même qu'elle n'est rien. Et s'il a nommé Socrate, il semble bien qu'il ne s'est servi de mon nom que pour me prendre comme exemple. C'est comme s'il disait : "Le plus sage d'entre vous ,hommes, c'est celui qui a reconnu comme Socrate que sa sagesse n'est rien." Voilà pourquoi aujourd'hui encore je vais partout, enquêtant et questionnant tous ceux des citoyens et des étrangers qui me paraissent être sages ; et, quand je découvre qu'ils ne le sont pas. je me fais le champion du dieu, en leur démontrant qu'ils ne sont pas sages. Ainsi occupé, je n'ai jamais eu le loisir de m'intéresser sérieusement aux affaires de la ville ni aux miennes, et je vis dans une pauvreté extrême, parce que je suis au service du dieu.

 

X. - En outre, les jeunes gens qui s'attachent à moi spontanément, ayant beaucoup de loisirs, parce que ce sont les fils de familles les plus riches, prennent plaisir à m'entendre examiner les gens et  souvent ils m'imitent eux-mêmes et ils essayent d'en examiner d'autres, et il est certain qu'ils trouvent bon  nombre de gens qui croient savoir quelque chose et qui ne  savent rien ou peu de chose. Par suite, ceux qu'ils examinent s'en prennent à moi  au lieu de s'en prendre à eux - mêmes, et  disent qu'il y a un certain Socrate, un scélérat. qui corrompt la jeunesse (...)

 

XXXIll. - Vous aussi, juges. vous devez avoir bon espoir en face de la mort et vous mettre dans l'esprit qu'il y a une chose certaine, c'est qu'il n'y a pas de mal possible pour l'homme de bien, ni pendant  sa vie, ni après sa mort, et que les dieux ne sont pas indifférents à son sort. Le mien non plus n'est pas le fait du hasard, et je vois clairement qu'il valait mieux pour moi mourir à présent et être délivré de toute peine. De là vient que le signe ne m'a retenu à aucun moment et  que je n'en veux pas beaucoup à ceux qui m'ont condamné ni à mes accusateurs. Il est vrai qu'en me condamnant et en m'accusant, ils n'avaient pas la même pensée que moi ; ils croyaient bien me nuire et en cela ils méritent d'être blâmés.

 

J'ai cependant une chose à leur demander. Quand mes fils auront  grandi, Athéniens, punissez-les en les tourmentant comme je vous tourmentais, si vous les voyez rechercher les richesses ou tout autre chose avant la vertu.

 

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Notes :

 


Socrate n'a rien écrit. Son enseignement nous parvient par de nombreuses sources dont les textes de ses disciples : le philosophe Platon et l'historien Xénophon. Toute la pensée du maître est livrée dans les dialogues de Platon. Fils d'une sage-femme, Socrate se dira aussi maïeutique*. Pour lui, la vérité est en l'homme et il faut l'extirper, l'accoucher.

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La maïeutique, par analogie avec le personnage de la mythologie grecque Maïa, qui veillait aux accouchements, est une technique qui consiste à bien interroger une personne pour lui faire exprimer (accoucher) des connaissances qu'elle n'aurait pas conceptualisées. Son invention remonte au IVe siècle av. J.-C. et est attribuée faussement au Socrate  historique, en faisant référence au livre Théétète de Platon. Le Socrate historique employait l'ironie (ironie Socratique) pour faire comprendre aux interlocuteurs que ce qu'ils croyaient savoir n'était en fait que croyance. La maïeutique, contrairement à l'ironie, s'appuie sur une théorie de la réminiscence pour faire ressurgir des vies antérieures les connaissances oubliées.

Ce n'est pas sans douleur. Cette obstétrique mentale se fonde sur l'ironie ; le principe de détachement de soi, de pauvreté. Elle consiste à confronter les opinions (dialectique) puis à dégager par induction une idée générale donnant la définition de l'objet cherché. Ainsi de la vertu. "Qu'est-ce que la vertu ?" demande Socrate à un sage. L'homme lui répond que c'est la droiture, l'honnêteté, etc. Socrate le corrige : "Tu ne réponds pas à ma question : Tu me donnes des exemples de vertus mais tu ne me dis pas ce qu'est la vertu." Tous les dialogues restent sur une  insatisfaction. Amoureux de la sagesse, le philosophe ne répond jamais à la question de la vérité. "Je ne sais qu'une chose, affirme Socrate, c'est que je ne sais rien." Aussi pose-t-il les questions essentielles qu'il laisse cheminer en nous pour une meilleure connaissance de soi. "Connais-toi toi même", sa devise, n'est pas de la psychologie mais la volonté de mobiliser en soi toutes les forces qui mènent à la vérité. La vie de Socrate est en parfaite adéquation avec la  pensée philosophique. Tandis que les sophistes étaient riches, Socrate ne s'attachait à aucune espèce de  contingences matérielles.  Il mourut en 399 av. J.,C. dans la sérénité et l'acceptation.

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Divers personnages....


DANTE


                                                                                                      Béatrice Portinari









Dante par Giotto








Première page de la Divine Comédie













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SOPHOCLE



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                                                                                                       Antigone




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Philotecte abandonné par les Grecs







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Sophocle  Bas relief en marbre









Sophocle




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Pythagore



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Le Banquet manuscrit sur papyrus.






Platon par Raphaël





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ARISTOTE





Aristote par Raphaël




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Aristote sur une fresque murale à Rome




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Alexandre à une bataille






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Alexandre combattant un lion







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Bronze - Alexandre









Buste d'Alexandre le Grand







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Alexandre et Aristote





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Enluminure "Chanson de Roland"










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Mort de Roland à Ronceveaux
















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Charlemagne et le Pape Adrien I






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Charlemagne et son fils Louis le Pieux






RUTEBOEUF

                            



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Ruteboeuf par Clément Marot

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